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Condamnation de Galilée. 167

manuscrit de son Monde. Mais, craignant le sort de Galilée, il n'envoya rien et s'en expliqua au bon religieux dans une lettre de la fin de novembre". Cette lettre ne parvint pas à son adresse. Descartes ne le sut qu'après une seconde lettre, où il rappelait la première : celle-ci avait-elle été simplement per- due, ou plutôt détournée et dérobée en chemin par quelque malveillant ? La méfiance et les soupçons de notre philosophe s'en accrurent, et il écrivit une troisième lettre plus explicite encore que les deux précédentes . Il ne parlait de rien moins que de supprimer entièrement son ouvrage, et de renoncer désormais à toute publication. On avait condamné le mouve- ment de la Terre : or ce mouvement faisait partie intégrante de sa Physique, et se déduisait nécessairement de ses prin- cipes : ceux-ci se trouvaient donc faux, si le mouvement l'était; ou du moins ils devenaient autant que lui condamnables, et passibles comme lui de la réprobation de Rome.

On se demande aujourd'hui ce qui pouvait effrayer Descartes à ce point ? 11 était en Hollande, pays protestant, hors d'atteinte par conséquent des coups qui avaient frappé Galilée. Pour lui, point de prison à redouter, ni d'interrogatoire avec menace de torture ; point d'abjuration, non plus, ni de relégation dans un endroic déterminé avec défense d'en sortir. Sans doute Galilée souffrit plutôt d'entraves à sa liberté intellectuelle, qu'à sa liberté physique ; mais c'était encore trop que cette contrainte morale contre laquelle protestait sa conscience de savant, aux prises peut-être elle-même avec sa conscience de catholique. Tandis que du bout des lèvres, et non sans un demi-sourire peut-être, il concédait à ses juges que la l'erre est immobile :

a. 'l'ome I, p. 270-27?. Voir aussi p. 285, 1. 2-4, ci p. 292, 1. 2-8. Toutefois cet accident arrivait de temps à autre. Saumaise écrivait de Leydc à .1. du l'uy, le i) juillet i632 : « ...ie vicii de roceuoir lettres de >' Monr"^ Bralfet, oii il mande que toutes les lettres de Hollande qui i) alloieni à Paiis, il y a huit iours, ont elle delfrouirées entre Anuers «S: .. Bucnberg... .• Bibl. Nat., MS. tr. 713, fol. 14.'

b. Tome 1. p. 2S1-282.

c. /hi.i.. p. 285-286.

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