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422 Vie de Descartes.

lui paraissait pas une si grande affaire. Et même il va jusqu'à trouver un biais, qui présente cette conversion sous un jour plutôt avantageux : la maison palatine, dans ses malheurs, n'a- t-elle pas intérêt à compter quelques-uns de ses membres dans les divers partis, disons dans tous les camps? Ceci est peut-être de la bonne politique, mais ne prouve pas que Descartes consi- dérât la religion, c'est-à-dire pourtant la question du salut éternel, comme le tout de l'homme. Descartes était au plus haut degré un esprit philosophique : ce n'était pas une âme religieuse. Elisabeth n'avait point sujet d'être autrement satis- faite de telles consolations, et peut-être faut-il attribuer à un petit refroidissement l'intervalle entre cette lettre de janvier 1646 et la suivante du 25 avril ^. Toutefois cela ne dura pas : la princesse et le philosophe avaient dû se revoir en mars 1646, s'expliquer sans doute de vive voix, et l'intimité fut rétablie, si tant est qu'elle eût besoin de l'être; à peine y eût-il un léger nuage dans un ciel aussitôt rasséréné.

Ce fut alors qu'éclata ce drame, dont nous ne connaissons que les événements extérieurs et publics, le meurtre, disons franchement, l'assassinat d'un gentilhomme français, L'Espi- nay, par un autre frère d'Elisabeth, le prince Philippe, âgé de vingt ans^. L'honnête Brasset, malgré sa prudence et sa réserve habituelle, contient à grand peine son indignation : ce sang, dit-il, crie vengeance. Philippe n'échappa que par la fuite à des poursuites judiciaires, abandonnées d'ailleurs presque aussitôt. Le crime fut commis un jeudi 20 juin 1646. Le i 5 août suivant, Elisabeth quittait La Haye, sur l'ordre de sa mère, semble-t-il, avec une de ses jeunes sœurs, Henriette, pour se rendre chez leur tante, l'électrice de Brandebourg ^ Son absence ne devait

a. Tome IV, p. 404-406 et p. 404, note a.

b. Ibid., p. 449-452 et surtout p. 670-675.

c. Voir ci-avant, p. 401, note b. La princesse Elisabeth partit avec « Madame Catherine », dit Brasset (cité t. IV, p. 673), c'est-à-dire, non pas Catherine de Lorraine, comme nous avions conjecturé à tort (ibid.), mais la princesse Catherme de Brandebourg, sœur de Georges-Guil- laume (voir t. V, p. 225, note e), lequel était oncle d'Elisabeth par

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