Page:Deschamps - Études françaises et étrangères, 1831, 5e éd.djvu/389

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Bernardin, couronné des mains de Virginie ;
Et madame de Staël, — cet homme de génie ! —
Et moi, tout palpitant, j’écoutais, j’admirais,
Et, dans mon jeune cœur, d’impatients regrets,
De turbulents désirs d’une gloire impossible,
Roulaient, comme un orage au fond d’un lac paisible ;
Et, de ces noms vantés idolâtrant l’honneur,
Je ne séparais point la gloire du bonheur ;
Car le poète en vain meurt de ses rêves sombres ;
Le laurier de son front nous en cache les ombres.
Le temps vola, rapide, et, lambeau par lambeau,
Tout entier le vieux siècle entra dans le tombeau ;
Mais, des restes poudreux de ce cadavre immense,
Jaillit la fraîche fleur de l’âge qui commence.
Et, tel qu’un villageois qui tristement s’assied
Sur les grands arbres morts, et pousse de son pied
Les branches, qui longtemps ombragèrent sa tête,
S’il aperçoit, parés comme pour une fête,
De jeunes plants ouvrir leurs bourgeons au soleil,
Et de la vie aux champs annoncer le réveil,
Avec leurs fronts riants, leurs bras gonflés de sève,
Leur taille, qui déjà se courbe et se relève,