Page:Deschamps - Études françaises et étrangères, 1831, 5e éd.djvu/391

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Et bien souvent, après une journée amère,
Rendant grâces à Dieu dans les bras de sa mère…
Tel tu serais, Joseph, tel je te rêve au moins !
Mais, n’avoir de ses maux que de muets témoins ;
Pour quelques pleurs amis, un sourire de femme,
Trouver partout la haine ou l’égoïsme infâme,
Dépenser le trésor de ses beaux ans virils
En calculs de vieillards, en travaux puérils ;
Marcher sans avancer, et gravir sans atteindre ;
Sentir au fond de soi l’amour même s’éteindre ;
Dire sur tous les siens la prière des morts ;
Passer incessamment des douleurs aux remords ;
Incessamment en proie à sa double nature,
Dans la lutte de l’âme et de la créature,
Se débattre, tantôt vaincu, tantôt vainqueur,
Et puis mourir longtemps dans les tourments du cœur.
Ah ! qu’il vaut mieux mourir en commençant de vivre !
Et n’aurais-tu pas vu se railler de ton livre
Fats et pédants, pareils sous des habits divers,
Qui ne comprendraient point tes peines ni tes vers,
Qui n’ont jamais pensé ni souffert de leur vie !
Car ce n’est pas chez eux l’injustice ou l’envie,