Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/326

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— Oh ! oui, monsieur, il est à la maison, dit Minnie. son asthme ne lui permet pas de sortir par ce temps-là. Joseph, appelez votre grand père ! »

Le petit garçon qui tenait son tablier poussa un cri d’appel si énergique qu’il en fut effrayé lui-même, et qu’il cacha sa tête dans les jupons de sa mère, à la grande admiration de celle-ci. J’entendis approcher quelqu’un qui soufflait à grand bruit, et je vis bientôt apparaître M. Omer, l’haleine plus courte encore que par le passé, mais du reste, très-peu vieilli.

« Votre serviteur, monsieur, dit M. Omer. Que puis-je faire pour vous ?

— Me donner une poignée de main, si vous voulez bien, monsieur Omer, dis-je en lui tendant la mienne, vous avez montré beaucoup de bonté pour moi un jour où je crains de ne pas vous en avoir assez témoigné ma reconnaissance.

— Ah ! vraiment ? répondit le vieillard. Je suis enchanté de ce que vous me dites là, mais je ne m’en souviens pas. Vous êtes bien sûr que c’est moi ?

— Parfaitement sûr.

— Il faut que j’aie la mémoire aussi courte que la respiration, dit M. Omer en secouant la tête et en me regardant, car je ne me rappelle pas votre figure.

— Vous ne vous souvenez pas d’être venu me chercher à la diligence, de m’avoir donné à déjeuner, et de m’avoir conduit ensuite à Blunderstone avec mistress Joram et M. Joram qui n’était pas son mari dans ce temps-là ?

— Comment, vraiment ? Dieu me pardonne ! dit M. Omer, jeté par sa surprise dans une quinte de toux, c’est vous, monsieur ! Minnie, ma chère, vous vous souvenez bien ç Il s’agissait d’une dame, n’est-ce pas ?

— Ma mère, lui dis-je.

— Cer…taine…ment, dit M. Omer en touchant mon gilet du bout de son doigt, et il y avait aussi un petit enfant. Deux personnes à la fois : la plus petite dans le même cercueil que la grande. À Blunderstone, c’est vrai. Et comment vous êtes-vous porté depuis lors ?

— Très-bien, lui dis-je, je vous remercie, et vous, j’espère que vous vous portez bien aussi.

— Oh ! je n’ai pas à me plaindre, dit M. Omer ; j’ai la respiration plus courte, mais c’est toujours comme cela en vieillissant. Je la prends comme elle vient, et je me tire d’affaire de mon mieux. C’est le meilleur parti, n’est-ce cas ? »