Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/379

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estrade en fer à cheval, je vis installés sur des chaises de salle à manger, commodes et de forme ancienne, de nombreux personnages, revêtus de robes rouges et de perruques grises : c’étaient les docteurs en question. Au contre du fer à cheval était un vieillard qui s’appuyait sur un petit pupitre assez semblable à un lutrin. Si j’avais rencontré ce vieux monsieur dans une volière, je l’aurais certainement pris pour un hibou ; mais non, informations prises, c’était le juge président. Dans l’espace vide de l’intérieur du fer à cheval, au niveau du plancher, on voyait de nombreux personnages du même rang que M. Spenlow, vêtus comme lui de robes noires garnies de fourrures blanches ; ils étaient assis autour d’une grande table verte. Leurs cravates étaient, en général, très-roides, leur mine me semblait de même ; mais je ne tardai pas à reconnaître que je leur avais fait tort sous ce rapport, car deux ou trois d’entre eux ayant dû se lever, pour répondre aux questions du dignitaire qui les présidait, j’ai rarement vu rien de plus humble que leurs manières. Le public, représenté par un petit garçon paré d’un cache-nez, et par un homme d’une élégance un peu râpée, qui grignotait, à la sourdine, des miettes de pain qu’il tirait de ses poches, se chauffait près du poêle placé au centre de la Cour. Le calme languissant de ce lieu n’était interrompu que par le pétillement du feu, et par la voix de l’un des docteurs, qui errait à pas lents à travers toute une bibliothèque de témoignages, et s’arrêtait de temps en temps au milieu de son voyage, dans de petites hôtelleries de discussions incidentes qui se trouvaient sur son chemin. Bref, je ne me suis jamais trouvé dans une petite réunion de famille aussi pacifique, aussi somnolente, aussi rococo, aussi surannée, aussi endormante, et je sentis que l’effet qu’elle devait produire à tous ceux qui en faisaient partie, excepté peut-être au plaideur qui demandait justice, devait être celui d’un narcotique puissant.

Satisfait du calme profond de cette retraite, je déclarai à M. Spenlow que j’en avais assez vu pour cette fois, et nous rejoignîmes ma tante, avec laquelle je quittai bientôt les régions des Doctors’-Commons ; ah ! comme je me sentis jeune en sortant de chez MM. Spenlow et Jorkins, quand je vis les signes que les clercs se faisaient les uns aux autres en me montrant du bout de leur plume.

Nous arrivâmes à Lincoln’s-Inn Fields sans nouvelles aventures, à l’exception d’une rencontre avec un âne attelé à la charrette