Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/384

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J’étais en train de déjeuner avec du café et un petit pain, le lendemain matin, avant de ma rendre à la Cour (à propos, je crois que c’est le moment de m’étonner, en passant, de la prodigieuse quantité de café que mistress Crupp achetait à mon compte, pour la faire si faible et si insipide), quand Steerforth lui-même entra, à ma grande joie.

« Mon cher Steerforth, m’écriai-je, je commençais à croire que je ne vous reverrais plus jamais.

— J’ai été enlevé à force de bras, dit Steerforth, le lendemain de mon arrivée à la maison… Mais, Paquerette, dites-moi donc, savez-vous que vous voilà installé comme un bon vieux célibataire. »

Je lui montrai tout mon établissement, sans oublier l’office, avec un certain orgueil, et il ne fut pas avare de ses louanges.

« Tenez ! mon vieux, je vais vous dire, reprit-il, je ferai ma maison de ville de votre appartement, à moins que vous ne me donniez congé. »

Quelle agréable promesse ! Je lui dis que, s’il attendait son congé, il pourrait bien attendre jusqu’au jugement dernier.

« Mais vous allez prendre quelque chose, lui dis-je en étendant la main vers la sonnette ; mistress Crupp va vous faire du café : et moi, je vais vous faire griller quelques tranches de lard sur un petit fourneau que j’ai là.

— Non non ! dit Steerforth, ne sonnez pas ! je vais déjeuner avec un de ces jeunes gens qui logent à Piazza-hôtel, près de Covent-Garden !

— Au moins, vous reviendrez pour dîner ? dis-je.

— Je ne pense pas, sur ma parole ; j’en ai bien du regret, mais il faut que je reste avec mes deux compagnons. Nous partons tous les trois demain matin.

— Alors, amenez-les dîner ici, répliquai-je, si vous croyez qu’ils puissent accepter.

— Oh ! ils viendraient bien volontiers, dit Steerforth ; mais nous vous gênerions. Vous feriez mieux de venir dîner avec nous, quelque part. »

Je ne voulus pas consentir à cet arrangement, car je m’étais mis dans la tête qu’il fallait absolument que je donnasse une petite fête pour mon installation, et que je ne pouvais rencontrer une meilleure occasion de pendre la crémaillère. J’étais plus fier que jamais de mon appartement, depuis que Steerforth l’avait honoré de son approbation, et je brûlais du désir de lui en développer toutes les ressources. Je lui fis promettre