Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/331

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à ce qu’il paraît ? Mais prenez garde. Vous ne réussirez pas ; nous nous connaissons, vous et moi ; nous ne nous aimons guère. Depuis votre première visite ici, vous avez toujours fait le chien hargneux, vous êtes jaloux de mon élévation, n’est-ce pas ? mais je vous en avertis, pas de complots contre moi ; ou les miens vaudront bien les vôtres. Micawber, sortez, j’ai deux mots à vous dire.

— Monsieur Micawber, dis-je, il s’est fait un étrange changement dans ce drôle : il en est venu à dire la vérité sur un point, c’est qu’il se sent relancé. Traitez-le comme il le mérite !

— Vous êtes d’aimables gens, dit Uriah, toujours du même ton, en essuyant, de sa longue main, les gouttes de sueur gluante qui coulaient sur son front, de venir acheter mon commis, l’écume de la société ; un homme tel que vous étiez jadis, Copperfield, avant qu’on vous eût fait la charité et de la payer pour me diffamer par des mensonges ! Mistress Trotwood, vous ferez bien d’arrêter tout ça, ou je me charge de faire arrêter votre mari, plutôt qu’il ne vous conviendra. Ce n’est pas pour des prunes que j’ai étudié à fond votre histoire, un homme du métier, ma brave dame ! Miss Wickfield, au nom de l’affection que vous avez pour votre père, ne vous joignez pas à cette bande, si vous ne voulez pas que je le ruine… Et maintenant, Micawber, venez-y ! je vous tiens entre mes griffes. Regardez-y à deux fois, si vous ne voulez pas être écrasé. Je vous recommande de vous éloigner, tandis qu’il en est encore temps. Mais où est ma mère ? dit-il, en ayant l’air de remarquer avec une certaine alarme l’absence de Traddles, et en tirant brusquement la sonnette. La jolie scène à venir faire chez les gens !

— Mistress Heep est ici, monsieur, dit Traddles, qui reparut suivi de la digne mère de ce digne fils. J’ai pris la liberté de me faire connaître d’elle.

— Et qui êtes-vous, pour vous faire connaître ? répondit Uriah ; que venez-vous demander ici ?

— Je suis l’ami et l’agent de M. Wickfleld, monsieur, dit Traddles d’un air grave et calme. Et j’ai dans ma poche ses pleins pouvoirs, pour agir comme procureur en son nom, quoi qu’il arrive.

— Le vieux baudet aura bu jusqu’à en perdre l’esprit, dit Uriah, qui devenait toujours de plus en plus affreux à voir, et on lui aura soutiré cet acte par des moyens frauduleux !