Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/369

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Oui. Et j’ai passé depuis bien des heures près de lui.

— Il est mort la veille de notre voyage à Canterbury ? »

Ma tante me fit signe que oui. « Personne ne peut plus lui faire de tort à présent, dit-elle. Vous voyez que c’était une vaine menace. »

Nous arrivâmes au cimetière d’Hornsey. « J’aime mieux qu’il repose ici que dans la ville, dit ma tante. Il était né ici. »

Nous descendîmes de voiture, et nous suivîmes à pied le cercueil jusqu’au coin de terre dont j’ai gardé le souvenir, et où on lut le service des morts. Tu es poussière et…

« II y a trente-six ans, mon ami, que je l’avais épousé, me dit ma tante, lorsque nous remontâmes en voiture. Que Dieu nous pardonne à tous ! »

Nous nous rassîmes en silence, et elle resta longtemps sans parler, tenant toujours ma main serrée dans les siennes. Enfin elle fondit tout à coup en larmes, et me dit :

« C’était un très-bel homme quand je l’épousai, Trot. Mais grand Dieu, comme il avait changé ! »

Cela ne dura pas longtemps. Ses pleurs la soulagèrent, elle se calma bientôt, et reprit sa sérénité. « C’est que j’ai les nerfs un peu ébranlés, me disait-elle, sans cela je ne me serais pas ainsi laissée aller à mon émotion. Que Dieu nous pardonne à tous ! »

Nous retournâmes chez elle à Highgate, et là nous trouvâmes un petit billet qui était arrivé par le courrier du matin, de la part de M. Micawber.

Canterbury, vendredi.

« Chère madame, et vous aussi, mon cher Copperfield, le beau pays de promesse qui commençait à poindre à l’horizon est de nouveau enveloppé d’un brouillard impénétrable, et disparaît pour toujours des yeux d’un malheureux naufragé, dont l’arrêt est porté !

« Un autre mandat d’arrêt vient en effet d’être lancé par Heep contre Micawber (dans la haute cour du Banc du roi à Westminster), et le défendeur est la proie du shérif revêtu de l’autorité légale dans ce bailliage.


Voici le jour, voici l’heure cruelle.
Le front de bataille chancelle ;
D’un air superbe Édouard, victorieux,
M’apporte l’esclavage et des fers odieux.


« Une fois retombé dans les fers, mon existence sera de