Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/67

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n’importe quoi. C’est pour cette nuit seulement ; nous parlerons de ceci plus au long. »

Je fus tiré de mon étonnement et du chagrin que j’éprouvais pour elle… pour elle, j’en suis certain, en la voyant tomber dans mes bras, s’écriant qu’elle n’en était fâchée qu’à cause de moi ; mais une minute lui suffit pour dompter son émotion, et elle me dit d’un air plutôt triomphant qu’abattu :

« Il faut supporter bravement les revers, sans nous laisser effrayer, mon enfant ; il faut soutenir son rôle jusqu’au bout ; il faut braver le malheur jusqu’à la fin, Trot. »


Dès que j’eus retrouvé ma présence d’esprit, qui m’avait complètement abandonné au premier moment, sous le coup accablant que m’avaient porté les nouvelles de ma tante, je proposai à M. Dick de venir chez le marchand de chandelles, et de prendre possession du lit que M. Peggotty avait récemment laissé vacant. Le magasin de chandelles se trouvait dans le marché d’Hungerford, qui ne ressemblait guère alors à ce qu’il est maintenant, et il y avait devant la porte un portique bas, composé de colonnes de bois, qui ne ressemblait pas mal à celui qu’on voyait jadis sur le devant de la maison du petit bonhomme avec sa petite bonne femme, dans les anciens baromètres. Ce chef-d’œuvre d’architecture plut infiniment à M. Dick, et l’honneur d’habiter au-dessus de la colonnade l’eût consolé, je crois, de beaucoup de désagréments ; mais comme il n’y avait réellement d’autre objection au logement que je lui proposais, que la variété des parfums dont j’ai déjà parlé, et peut-être aussi le défaut d’espace dans la chambre, il fut charmé de son établissement. Mistress Crupp lui avait déclaré, d’un air indigné, qu’il n’y avait pas seulement la place de faire danser un chat, mais comme me disait très-justement M. Dick, en s’asseyant sur le pied du lit et en caressant une de ses jambes : « Vous savez bien, Trotwood, que je n’ai aucun besoin de faire