Page:Dickens - La Petite Dorrit - Tome 1.djvu/269

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rien de pareil ; eh bien, malgré ça, je viens vous présenter une dernière remarque, vous donner une dernière explication.

— Ma chère madame Finching…, fit d’un ton de remontrance Arthur effrayé.

— Oh ! pas ce nom désagréable, dites Flora !

— Flora, est-ce bien la peine de rentrer dans de nouvelles explications ? Je vous assure que c’est tout à fait inutile. Celles que vous m’avez données m’ont satisfait, entièrement satisfait. »

La tante de M. Finching causa alors une diversion en faisant cette terrible et inexorable observation :

« Il y a des bornes milliaires tout le long de la route de Douvres ! »

La tante de M. Finching mit tant de haine pour le genre humain en général dans la vivacité avec laquelle elle lança ce projectile, que Clennam ne savait pas trop comment s’en défendre, d’autant plus qu’il avait tout d’abord été fort troublé par la visite dont l’honorait cette vénérable dame, qui ne cachait pas l’exécration que lui inspirait son hôte. Il ne put s’empêcher de la regarder d’un air déconcerté, tandis qu’elle respirait l’amertume et le mépris, regardant devant elle à une distance de plusieurs milles. Cependant Flora accueillit la réminiscence géographique de la tante de M. Finching, comme si cette dame eût fait une observation pleine de charme et d’à-propos, remarquant d’un ton approbateur que la tante de M. Finching était une femme très énergique. Encouragée par cet éloge ou poussée par sa vive indignation, cette illustre dame ajouta alors : « Qu’il vienne s’y frotter, s’il l’ose ! » Et, par un mouvement saccadé de son ridicule rocailleux (cet ornement était d’une certaine ampleur et d’une apparence fossile), elle indiqua que Clennam était l’infortuné personnage auquel s’adressait ce défi.

« Je vous disais donc, reprit Flora, que je désire vous présenter une dernière remarque, vous donner une dernière explication. La tante de M. Finching et moi nous ne serions pas venues vous déranger durant vos heures de bureau, M. Finching ayant lui-même été dans les affaires ; car, bien qu’il fût dans le commerce des vins, les affaires n’en sont pas moins des affaires, quelque nom qu’on leur donne, et les habitudes des hommes affairés sont toujours les mêmes, témoin M. Finching, dont les pantoufles se trouvaient toujours sur le paillasson à six heures moins dix de l’après-midi, et les bottes auprès du feu à huit heures moins dix du matin, à la minute, par tous les temps, jour ou non. Nous ne vous aurions donc pas dérangé sans un motif dont l’intention me fait espérer qu’il ne peut manquer d’être bien accueilli, Arthur… M. Clennam serait beaucoup plus convenable, il est même probable que je devrais dire Doyce et Clennam.

— Ne vous excusez pas, je vous en prie, supplia Clennam, vous êtes toujours la bienvenue.

— C’est très poli à vous de me dire cela, Arthur… je ne peux pas me rappeler M. Clennam avant que l’autre nom me soit