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NICOLAS NICKLEBY.

aimable dame s’accommode le plus avec votre éducation, vos manières, votre physique ! N’avez-vous jamais entendu votre pauvre cher papa parler de la fille d’une vieille dame qui logeait dans la même maison que lui quand il était garçon ? Comment s’appelait-elle ? Je sais que son nom commençait par un B et finissait par un G, mais j’ignore si c’était Waters ou… Ce ne pouvait être ni l’un ni l’autre. Enfin ne savez-vous pas que la jeune fille entra en qualité de dame de compagnie chez une femme mariée, qui mourut bientôt après, et qu’elle épousa le veuf, et eut l’un des plus beaux enfants que le médecin eût jamais vus.

Catherine savait parfaitement que ce torrent de souvenirs favorables avait sa source dans quelque nouvelle découverte de sa mère. Elle attendit donc patiemment la fin des anecdotes relatives ou étrangères au sujet, et se hasarda à demander quelle place sa mère avait trouvée. La vérité se dévoila. Madame Nickleby avait lu le matin dans un journal un avertissement annonçant qu’une dame mariée, demeurant Cadogan place, désirait pour dame de compagnie une jeune personne de bonne famille.

Après la longue lutte qu’elle avait déjà soutenue avec le monde, Catherine était trop abattue, et s’inquiétait trop peu du sort qui lui était réservé, pour faire la moindre objection. M. Ralph Nickleby n’en présenta aucune ; mais au contraire il approuva hautement cette résolution. Il ne parut nullement surpris de la faillite subite de madame Mantalini, et il eût été étrange qu’il le fût, car il en avait été l’un des principaux provocateurs. On se procura donc le nom et l’adresse sans perte de temps, et miss Nickleby et sa mère se rendirent dans l’après-midi chez madame Wititterly, Cadogan place, Sloane street.

Catherine et sa mère furent introduites dans une salle à manger d’un aspect misérable et malpropre, et disposée d’une manière si confortable qu’elle était bonne pour toute espèce d’usage, excepté pour boire et pour manger.

Madame Wititterly donna audience dans le salon, convenablement meublé, et contenant des rideaux et des fauteuils couverts en rose pour jeter un tendre reflet sur le teint de madame Wititterly, un petit chien pour mordre les jambes des étrangers, afin d’amuser madame Wititterly, et le page pour présenter le chocolat afin de restaurer madame Wititterly.

Elle était à demi couchée sur un sopha, dans une attitude très-naturelle, qu’on eût pu croire empruntée à une actrice de ballet prête à entrer en scène et attendant le lever de la toile.

— Avancez des fauteuils.