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AMM

se sert de cette pierre pulvérisée pour mettre sur l’écriture, parce qu’elle est mêlée de quantité de paillettes d’or ; ce qui fait qu’on lui donne communément le nom de poudre d’or, ou poudre dorée.

AMMODYTE. s. m. Serpent de couleur de sable, & tout couvert de taches noires. Ammodytes. Il ressemble à la vipère. Son venin est fort subtil, & sur-tout celui de la femelle. D’ἄμμος, sable, & δῦμι, j’entre. Ce serpent est aussi appelé Céraste.

AMMON. Ammon. Epithète ou surnom qu’on donnoit à Jupiter en Lybie, où étoit le temple célèbre de Jupiter Ammon. Quelques-uns écrivent Hammon, & l’on a eu différens sentimens sur l’origine de ce nom. Quelques Auteurs ont cru qu’il venoit du grec ἄμμος, qui signifie sable, & qu’il vouloit dire un lieu sablonneux, parce que le lieu où il étoit adoré, étoit au milieu des sables brûlans de la Lybie. Mais Plutarque, dans son Livre d’Isis & d’Osiris, nous assure que ce nom est égyptien, & non point grec, étant beaucoup plus ancien que la langue grecque en Afrique. Hérodote & Hésichius nous témoignant qu’Ammon est Jupiter, il n’y a pas d’apparence que ce soit là la véritable étymologie. Bochart, dans son Phaleg. Liv. II, ch. 4, dit que les Egyptiens ont appelé une brebis עמן, aman, comme les Arabes le font encore ; que de-là est venu le nom d’Ammon, parce que ce fut un bélier qui l’indiqua, ou le fit connoître, ainsi que le rapportent Hyginus d’après Hermippus, Germanicus sur Aretus & Athenagoras dans son Ve Liv. des Amours. Fuller, au Liv. II de ses Miscellanea, soutient que Jupiter Ammon étoit le soleil, que les Hébreux appellent חמה, hhama, de חמם, hhamam, être chaud, brûler ; que les cornes avec lesquelles on le représentoit, en sont une preuve, n’étant autre chose que les rayons du soleil, parce qu’en hébreu rayon s’appelle corne, & que le même mot קרן, Keren, signifie l’un & l’autre. On peut ajouter que Pline & Quinte-Curse mettent proche de l’oracle d’Apollon une fontaine fameuse, que l’un appelle, Fontaine du soleil ; & l’autre, Eau du soleil. Vossius veut que Jupiter Hammon soit Cham, ou Hham, חם, fils de Noé, dont la postérité peupla l’Afrique, & adora Hham sous le nom d’Ammon. En effet l’Egypte est appelée Terre de Cham dans l’Ecriture, Ps. CIV, 23 ; & Plutarque nous assure qu’on la nommoit Chemie ou Chamie. Cette dernière opinion n’est pas la moins vraisemblable. Quoiqu’il en soit, Jupiter Ammon étoit représenté sous la figure d’un bélier. Lucain le décrit au Liv. IX, v. 512. Stat corniger illuc Jupiter, &c. que Brebeuf a rendu ainsi.

Ils approchoient du lieu de ce temple sauvage,
Où Jupiter Ammon reçoit un plein hommage.
Il n’est pas en ces lieux la foudre dans la main,
Ni sous un air divin, ni sous un air humain :
Ce Dieu des autres Dieux & l’arbitre & le maître,
Y paroît sous un port indigne de son être.

Nous avons cependant des médailles où Jupiter Ammon est représenté en forme humaine, ayant seulement deux cornes de bélier, qui naissent au-dessus des oreilles, & se recourbent tout autour, comme on le peut voir sur une médaille frappée à Cassandrie pour Vespasien, & rapportée par M. Vaillant dans ses Colonies, T. I, p. 190. Alexandre fit un voyage au temple de Jupiter Ammon, dont on trouve une élégante description dans Quinte-Curce, Liv. IV, ch. 7. Il y a beaucoup de choses sur Ammon & sa figure, dans la première & la seconde Diss. de M. Vandale de Oraculis.

Ammon, lieu qu’on nomme aujourd’hui Canzaro di Mahoma. Ammon, Ammonis oraculum, Fons solis. Il est dans le désert de Barca, à cinquante lieues au midi du port d’Alberton. Il y avoit autrefois un temple de Jupiter, que l’on appeloit à cause de cela le temple de Jupiter Ammon. Jupiter Ammon étoit représenté avec des cornes de bélier, comme on le voit encore sur les médailles. On prétend que c’est de-là que venoit le sel ammoniac, & qu’il en avoit pris son nom. Voyez ce mot.

Ammon, est encore le nom propre d’un des fils de Loth, né de l’inceste de ce patriarche avec la plus jeune de ses deux filles, Gen. XIX, 28 ; mais il vient de עמון, & signifie mon peuple.

Ammon, se dit aussi en général du peuple composé des descendans d’Ammon, autrement les Ammonites.

Ammon. Corne d’Ammon. Voyez Corne.

Ammon. Nom d’homme. S. Ammon, solitaire, fondateur de l’hermitage de Nitrie en Egypte, dont le vrai nom étoit Amous, ou Amoun, naquit dans la basse Egypte vers les commencemens de l’empire de Dioclétien. Baill.

AMMONÉEN, ENNE. adj. m. & f. Lettres ammonéennes. Philon de Bibles, dans Eusèbe, nous dit, en parlant de l’histoire de Sanchoniathon, que l’Auteur l’avoit composée à l’aide de certains mémoires qu’il trouva dans les temples, & qui étoient écrits en lettres ammonéennes, non entendues du vulgaire. Ces lettres ammonéennes, suivant l’explication de Bochart, étoient celles dont les Prêtres se servoient dans les choses sacrées. Essai sur les Hyérogliph.

☞ AMMONIA. Terme de Mythologie. Surnom sur lequel les Eléens sacrifioient à Junon, par allusion à Jupiter-Ammon son époux, ou bien parce qu’elle avoit un autel dans le voisinage du temple de Jupiter-Ammon.

AMMONIAC. s. m. C’est le nom d’une gomme dont on se sert en Pharmacie. Gummi ammoniacum. On nous l’apporte des Indes Orientales, & on croit qu’elle découle d’une plante ombellifere. Elle doit être en larmes sèches, blanchâtres en dedans, un peu roussâtres en dehors, faciles à se fondre, gommeuses & résineuses, un peu amères, d’une odeur & d’un goût âcre, tenant de l’ail. On en apporte aussi en masses remplies de petites larmes bien nettes & bien blanches. Cette gomme roussit en vieillissant ; Dioscoride & Pline en font mention. Dioscoride dit que l’ammoniac est le jus d’une espèce de férule qui croît en Afrique, auprès de Cirène de Barbarie. La plante qui le porte, & sa racine, s’appellent Agasyilis. Le bon ammoniac est haut en couleur, & n’est brouillé ni de raclure de bois, ni de sable, ni de pierres. Il a des petits grains comme l’encens, tient de l’odeur du castoreum, & est amer au goût. On appelle le bon Ammoniac, θραὒσμα ; c’est-à-dire, émiettement & brisure ; & celui qui est plein de pierres & de sable φύραμα ; c’est-à-dire, mixtion. Pline appelle l’arbre d’où il découle Metopion, du grec μέτωπινο, & dit que son nom vient du temple, de Jupiter Ammon, auprès duquel croît cet arbre. L’ammoniac des Apothicaires est réduit en masse comme la poix résine, au lieu d’être fraisé & menu comme de l’encens. On prétend qu’il servoit d’encens aux Anciens dans leurs sacrifices. Cette gomme entre dans plusieurs compositions ; elle est purgative, fondante, & résolutive, étant appliquée extérieurement. Gaser en tire un esprit & une huile, qui ont, à ce qu’il dit, de grandes propriétés, lesquelles ne procèdent que du sel volatil qu’elle contient. Mais comme il est mêlé d’un acide qui empêche son activité, il donne le moyen de séparer ces deux esprits, lesquels sont capables, selon lui, de produire des effets tout différens. Voyez cet Auteur, Lémery, & les autres Chimistes modernes.

☞ Ce mot est plus souvent adjectif. Ammoniac, aque. Gomme ammoniaque, suc concret qui tient le milieu entre la gomme & la résine, dont on vient de parler.

Sel ammoniac, & non pas armoniac. Sel neutre formé par l’union du sel marin & de l’alcali, qu’on nomme volatil. Il y a le sel ammoniac naturel. & le sel ammoniac factice. Le factice se tire de l’urine & des excrémens des chameaux. Sal ammoniacus. Il est appelé par les Chimistes Aquila cœlestis. Celui de Venise & d’Amsterdam se fait d’une partie de suie de cheminée, de deux parties de sel marin, & de dix parties d’urine d’homme.

Il s’en trouve de naturel sur le chemin de Lahor à Thanasseri & à Tzéhint. C’est une espèce d’écume qui sort de la terre en des endroits où il y a de vieilles cavernes, ou creux de rochers. On le tire de-là, & on le cuit comme on fait le salpêtre. Rec. de Thevenot.