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APO

taires qui font les expéditions pour la Cour de Rome. Acad. Fr.

☞ Chambre Apostolique. Tribunal où sont traitées les affaires qui concernent le trésor ou le domaine du S. Siége.

Apostolique. s. m. & f. Apostolicus. Nom de secte d’hérétiques. Il y a eu deux sortes d’hérétiques qui ont eu ce nom. Les premiers Apostoliques, nommés autrement Apotactiques, sortirent de la secte des Encratites & des Cathares. Ils faisoient profession de ne se point marier, de s’abstenir de vin, de viande, de renoncer aux richesses, & d’imiter en cela les Apôtres. C’est pourquoi ils s’appellerent Apostoliques, par un esprit d’orgueil, dit S. Augustin, her. 40. Ils parurent vers l’an 260, d’autres disent en 145 ; mais ils entendent apparemment parler de leurs peres, les Encratistes ; car les Apostoliques ne firent bande à part que vers le milieu du troisième siècle. Voyez Saint Epiphane, her. 61. Aug. her. 40. & Baron. à l’an 260. Ils s’appellerent aussi Cathares & Apotactiques. Voyez ces mots.

Les autres hérétiques nommés Apostoliques, parce qu’ils s’imaginoient vivre apostoliquement, sont du douzième siècle. Ils condamnoient le mariage, & menoient avec eux des femmes de mauvaise vie : ils rejetoient le baptême des enfans, la prière pour les morts, & l’invocation des Saints, n’admettoient point de purgatoire, & suivoient en bien des choses les extravagances des Manichéens. Saint Bernard écrivit contre eux.

APOSTOLIQUEMENT. adv. A la manière des Apôtres, saintement, avec simplicité. Apostolorum in morem. Ce Prélat vit sans faste, & apostoliquement.

APOSTOLORUM. s. m. Unguentum Apostolorum. Terme de Pharmacie. Sorte d’onguent mondicatif, qui est composé de douze drogues, en pareil nombre que celui des Apôtres : ce qui lui a donné ce nom. Il a été inventé par Avicenne. On l’appelle aussi, Onguent de Vénus, à cause qu’il est de couleur verte.

APOSTRE. Voyez Apôtre.

APOSTROPHE. s. f. Figure de Rhétorique, par laquelle l’Orateur interrompt le discours qu’il tenoit à l’Auditoire, pour s’adresser nommément à quelque personne, soit aux Dieux, soit aux hommes, aux vivans, aux morts, même à des choses inanimées, comme à des tombeaux & autres monumens. Apostropha, conversio. Le Prédicateur a fait une apostrophe fort belle & fort touchante. L’apostrophe que Cicéron adressa à Tubéron dans l’oraison qu’il a faite pour Ligarius, est un des plus beaux endroits de ce discours.

☞ Cette figure par laquelle l’Orateur détourne son discours, & perd de vue ses Auditeurs, fait quelquefois un bel effet ; mais elle doit être employée sobrement.

☞ Ce mot vient du grec ἀποστροφὴ, aversio, formé de ἀπο, ab, & στρέφω, verto.

Apostrophe en Grammaire. C’est une petite note, un petit trait courbe dont on se sert pour marquer l’élision ou le retranchement d’une voyelle. Apostrophus, elisæ vocalis nota. Ainsi dans ces mots l’homme, l’ame, l’église, l’état, &c. La petite note, le signe ainsi figuré ’qu’on met en haut entre la consonne & la voyelle pour marquer la suppression de la voyelle finale, s’appelle apostrophe.

☞ Ce mot pris pour le signe de la suppression d’une voyelle finale, devroit être du genre humain.

☞ APOSTROPHER. v. a. Détourner son discours pour adresser la parole à quelque personne, ou à quelque chose que l’on personnifie. Compellare, alloqui aliquem. L’endroit où Démosthène apostrophe les morts à la journée de Marathon lui a fait autant d’honneur que s’il avoit ressuscité les morts qu’il avoit apostrophés. Perr.

 J’aimerois mieux encor ces Prêcheurs furieux,
Qui portant vers le ciel leurs regards effroyables,

Apostrophent les Saints comme on chasse les Diables.
Sanlecq.

Apostropher se prend aussi pour appeler, qualifier, adresser la parole à quelqu’un, pour lui dire quelque chose de désagréable. Cet homme apostrophe tout le monde. Pourquoi m’apostrophez vous ainsi ?

Un pédant qu’à tous coups votre femme apostrophe
Du nom de bel esprit, & de grand Philosophe.

Mol.

Apostropher se dit aussi en plaisantant, lorsqu’on veut parler des coups que l’on donne ou que l’on reçoit. Apostropher quelqu’un d’un souflet, c’est-à-dire, lui donner un souflet.

Un Magister s’empressant d’étouffer
Quelque rumeur parmi la populace,
D’un coup dans l’œil se fit apostropher.
Dont il tomba faisant laide grimace.

Rousseau.

☞ APOSTROPHIE. Terme de Mythologie. Nom donné par Cadmus à Venus Uranie ou Céleste, que les Grecs révéroient, afin d’être détournés de toute impureté. Les Romains lui dédierent un temple du temps de Marcellus, suivant un avis qu’ils trouverent dans le livre des Sibylles, sous le nom de Verticorda, c’est-à-dire, qui tourne, ou change les cœurs. Les femmes débauchées y alloient offrir leurs présens, pour se convertir, & les jeunes filles pour conserver leur chasseté. Pausanias, l. I. & 9, cité par Mor.

APOSTUME. Voyez Apostème.

APOSTUMER. v. n. Se former en apostème, en pus. Suppurare. Cette veine n’a pas été bien dégorgée, il faut craindre qu’elle n’apostume. Cette contusion commence à apostumer.

☞ Puisqu’on veut que nous disions apostème au lieu d’apostume, ne devroit-on pas dire apostèmer au lieu d’apostumer.

APOTACTITE. s. m. Apotactica. Nom de secte, qui signifie, renonçant, du grec, ἀποτάσσω, ou ἀποτάττω, je renonce. Les Apotactites étoient des gens qui pour suivre le conseil évangélique de la pauvreté, & l’exemple des Apôtres & des premiers fidèles, renonçoient à leurs biens, & ne possédoient rien. Il ne paroît pas qu’ils errassent dans les commencemens. Nile même, dans la passion de Saint Théodore Martyr, ch. 2, avoue qu’ils ont eu de saintes vierges martyres dans la persécution de Dioclétien au commencement du IV siècle ; mais ensuite ils tomberent dans l’erreur comme les Encratites, ou Abstinens, & enseignèrent que ce renoncement aux richestes étoit non-seulement un conseil, mais encore un précepte, &c. Ainsi la loi 6 du Code Théodosien de hæret. les joint aux Eunomiens & aux Ariens, & leur défend toute sorte d’assemblées.

APOTEVITZ. Petite ville de l’Esclavonie, en Hongrie. Apetevitzza. Elle est dans le comté de Creits ou Creiss, au nord de la ville de ce nom, & près de celle de Dopranitz.

☞ APOTHEME. s. m. En Géométrie. Perpendiculaire menée du centre d’un polygone régulier sur un de ses côtés. Encyc.

APOTHÉOSE. s. f. Consécration, déification. Ce mot se dit principalement de la cérémonie par laquelle les anciens Romains mettoient leurs Empereurs au rang des Dieux ; après quoi ils leur élevoient des temples & des autels. Apotheosis, Consecratio, Relatio in Deos. C’étoit un dogme que Pythagore avoit puisé chez les Chaldéens, que les personnes vertueuses étoient mises après leur mort au rang des Dieux. Les Païens déifioient les inventeurs des choses utiles au genre humain, & ceux qui avoient rendu quelque service important à la République. Juvénal, en se moquant des fréquentes apothéoses, plaignoit le pauvre Atlas, qui alloit succomber sous le fardeau de tant de Dieux qu’on plaçoit tous les jours dans le Ciel. Bayl. Sénèque se moque agréablement de l’apothéose de Claudius. Tibère proposa au Sénat l’apothéose de Jésus-Christ, comme le rapportent Eusèbe, Tertullien, & S. Chrysostôme.