dix en dix, l’Arithmétique binaire emploie la progression de deux en deux, la plus simple de toutes, & M. Leibnitz prétendoit qu’elle sert à la perfection des nombres. On n’y emploie point d’autres caractères que 0 & 1, & puis allant à deux, l’on recommence. C’est pourquoi deux s’écrit par 10, & deux fois deux ou quatre par 100, & deux fois quatre ou huit par 1000, & deux fois huit ou seize par 10000, & ainsi de suite, comme on le voit dans la table qui suit, & qu’on peut continuer tant que l’on voudra.
Car c’est ici comme si on disoit que 111 ou 7 est la forme de 4, de 2 & d’un. | 100 | 4 |
10 | 2 | |
1 | 1 | |
111 | 7 | |
Et que 1101 ou 13 est la forme de 8, 4 & un. Cette propriété sert aux essayeurs pour peser toutes sortes de masses avec peu de poids, & pourroit servir dans les monnoies pour donner plusieurs valeurs avec peu de pièces. | 1000 | 8 |
100 | 4 | |
1 | 1 | |
1101 | 13 |
Cette expression des nombres étant établie, sert à faire très-facilement toutes sortes d’opérations.
Pour la division. | 15 | 101 | 5 | |||||||
3 | ||||||||||
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Et toutes ces opérations sont si aisées, qu’on n’a jamais besoin de rien essayer ni deviner, comme il faut faire dans la division ordinaire. On n’a pas besoin non plus de rien apprendre par cœur, comme il faut faire dans le calcul ordinaire, où il faut savoir, par exemple, que 6 & 7 pris ensemble font 13, & que 5 multiplié par trois donne 15, suivant la table d’une fois un est un, qu’on appelle Pythagorique. Mais ici tout cela se trouve & se prouve de source, comme l’on voit dans les exemples précédens sous les signes & .
Cependant il ne faut point introduire cette manière de compter à la place de la pratique ordinaire par dix : car outre qu’on est accoutumé à celle ci, on n’y a pas besoin de chercher ce qu’on a déjà appris par cœur. Ainsi la pratique par dix est plus abrégée, & les nombres y sont moins longs. Et si l’on étoit accoutumé à aller par douze & par seize, il y auroit encore plus d’avantage : mais le calcul par deux, c’est-a dire, par 0 & par 1, en récompense de la longueur, est le plus fondamental pour la science, & donne de nouvelles lumières qui se trouvent utiles ensuite, même pour la pratique des nombres, & sur-tout pour la Géométrie, dont la raison est que les nombres étant réduits aux plus simples principes, comme 0 & 1, il paroit partout un ordre merveilleux. Par exemple, dans la table, même des nombres on voit en chaque colonne régner des périodes qui recommencent toujours. Dans la première colonne c’est 0 1, dans la seconde c’est 0011, dans la troisième 00001111, dans la quatrième 0000000011111111, & ainsi de suite. Et l’on a mis de petits zéros dans la table, pour remplir le vide au commencement de la colonne, & pour mieux marquer ces périodes. On a mené aussi des lignes dans la table, qui marquent que ce que ces lignes renferment, revient toujours sous elles. Il se trouve encore que les nombres carrés, cubiques & d’autres puissances, item les nombres triangulaires, pyramidaux, & autres nombres figurés, ont aussi de semblables périodes ; de sorte qu’on en peut écrire les tables tout de suite sans calculer. Or une prolixité dans le commencement, qui donne ensuite le moyen d’épargner le calcul, & d’aller à l’infini par règle, est infiniment avantageuse. Leibnitz, Mém. de l’Acad. des Sc. 1703. M. Leibnitz a fait remarquer que l’on va plus loin dans la science des nombres par une arithmétique, qui ne compte que jusqu’à deux, que par notre arithmétique qui compte jusqu’à dix. M. Pellican a fait un traité intitulé, Arithmeticus perfectus, quitria numerare nescit, seu arithmetica dualis, &c à Prague.
Les Indiens sont assez versés dans l’arithmétique ; mais ce n’est que dans ce qui regarde la pratique. Ils apprennent l’art de compter dès leurs plus tendre jeunesse ; & sans se servir de la plume, ils font par la seule force de l’imagination toutes sortes de comptes sur leurs doigts. Je crois pourtant qu’ils ont quelque méthode mécanique qui leur sert de règle pour cette méthode de calculer. Lettres Édifiantes.
Les Chinois n’emploient point le zéro dans leur arithmétique. Ils n’en pratiquent guère les règles par le calcul ; mais ils se servent d’un instrument composé d’une petite planche d’un pied & demi de long, sur le travers de laquelle ils passent six à douze petits bâtons coulans : en les assemblant, ou en les retirant les uns des autres, ils comptent à-peu-près comme nous ferions avec des jetons, avec tant de facilité, qu’ils suivent sans peine un homme, quelque vite qu’il lise un livre de compte, & à la fin on trouve l’opération toute faite, & ils ont leur manière d’en faire l’épreuve. P. Le Comte.
Les Musulmans disent qu’Enoch, qu’ils appellent Edris, est l’inventeur de l’arithmétique.
Ce mot vient du grec ἀριθμὸς, numerus, nombre.
Arithmétique ; adj. Qui appartient à l’arithmétique.