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suffragans) ou celui à qui il en a donné un pouvoir spécial qui puisse en donner l’absolution. Pour recevoir l’absolution des censures, il n’est pas nécessaire d’être présent, ni même de la vouloir. L’absolution des censures doit toujours précéder l’absolution des péchés. On peut recevoir l’absolution d’une censure, & demeurer lié par une autre. Tout Prêtre, en péril de mort, peut donner l’absolution de toutes sortes de censures & de cas réservés. On ne peut être délié des censures que par l’absolution.

Il y a une absolution des censures qu’on nomme à cautèle, ou à caution, ad cautelam ; & une autre qu’on appelle Absolution cum reincidentiâ.

L’absolution à cautèle ou par précaution, se donne dans l’ordre judiciaire, & dans le for de la pénitence. Dans l’ordre judiciaire, c’est une sentence du Juge supérieur ecclésiastique, au tribunal duquel on appelle de la sentence d’excommunication, qu’un Juge ecclésiastique inférieur a portée contre quelqu’un, qui rend capable de se défendre en justice ou d’ester à droit. Le Roi Louis XIV l’a ainsi déclaré sur la demande de l’assemblée générale du Clergé, dans sa déclaration du mois d’Avril de l’an 1666, & dans l’article 4e de l’édit de 1695, concernant la juridiction ecclésiastique. Aujourd hui l’absolution à cautèle n’a point d’autre effet ; & elle ne suspend point, comme autrefois, la sentence d’excommunication.

Dans le sacrement de pénitence, c’est un acte judiciaire du prêtre qui délie des censures dont on pouvoit être lié sans le savoir, afin qu’on soit en état de profiter de l’absolution sacramentelle. Les Papes ont aussi coutume de donner l’absolution ad cautelam, pour rendre un impétrant capable de jouir de la grâce que le Saint-Siége lui accorde par un rescrit. Dans cette vue on a soin, à Rome, d’insérer dans la provision des bénéfices cette clause : Cum absolutione à censuris ad effectum, &c.

Absolution, en matière de religion, est un acte juridique, par lequel un prêtre approuvé, comme juge, & en vertu du pouvoir qu’il a reçu de J. C. remet les péchés au pénitent, qui est dans les dispositions nécessaires. Ménage prétend qu’il faut dire absolution sacramentelle, plutôt que sacramentale. L’usage paroît autoriser l’un & l’autre. Ceux qui, par l’absolution sacramentelle eussent été en la grâce de Dieu. God. Les Luthériens ont retenu l’absolution sacramentale. Boss. L’absolution qu’Hincmar envoya par lettre à Hildebold, Evêque de Soissons, n’étoit qu’une espèce d’indulgence & de bénédiction, & non une absolution sacramentelle, puisqu’il suppose d’ailleurs que l’on doit se confesser au prêtre en détail ; & que non-seulement il le suppose, mais qu’il avertit Hildebold de le faire. Fleury. De plus, dit-il, je vous avertis par précaution, ne doutant point que vous ne l’ayez déja fait, qu’outre cette confession générale, vous ayez soin de confesser en détail à Dieu, & à un prêtre, tout ce que vous reconnoissez avoir commis depuis le commencement de votre vie jusqu’à présent.

Le Pere Amelote de l’Oratoire, au liv. 9, ch. 3 de son Abrégé de Théologie, dit en parlant du sacrement de la pénitence : La principale force du sacrement, ce qui en est comme l’ame, & où réside principalement l’influence & la vertu de Jesus-Christ jugé pour nous, c’est dans le sacrement d’absolution que le prêtre prononce par ces paroles : Je t’absous de tes péchés. L’absolution, ou les paroles de l’absolution, sont la forme du sacrement de pénitence, ainsi que l’enseignent le Concile de Florence dans le Décret ad Armenos, & le Concile de Trente Sess. xiv, c. 3. Cette forme est absolue dans l’Eglise Latine, & déprécatoire dans l’Eglise Grecque, ainsi que l’on peut voir dans l’Eucologe des Grecs, imprimé à Venise en 1638 ; dans la censure de la Confession d’Ausbourg, faite par Jérémie, Patriarche de Constantinople ; & dans l’Instruction de Clément VIII, sur les Rits des Grecs, imprimée en 1595. Arcudius prétend néanmoins que la forme de ce sacrement est absolue chez les Grecs, aussi-bien que chez les Latins, & que ce sont ces mots : Mea mediocritas habet te veniâ donatum. Mais les exemples qu’il en apporte, ou ne sont point des formules d’absolution, ou sont des formules d’absolution d’une excommunication ; mais non pas de l’absolution sacramentelle. D’ailleurs, Arcudius avoue lui-même que plusieurs prêtres ne disent point la formule qu’il rapporte. Enfin, il faut juger du Rit Grec plutôt par les Eucologes, que par les passages de Gabriel de Philadelphie, & des autres particuliers que cite Arcudius. L’absolution sacramentelle n’est pas déclaratoire seulement ; elle remet véritablement les péchés. Le P. Seguenot de l’Oratoire ayant dit dans ses Remarques sur le livre de la sainte Virginité de S. Augustin : Qui diroit que l’absolution n’est autre chose qu’un acte judiciaire, par lequel le prêtre déclare, non simplement, mais avec autorité, & de la part de Jesus-Christ, que les péchés sont remis, & en prononce l’arrêt juridiquement, celui-là n’avanceroit rien, à mon avis, ni contre le Concile de Trente, qui semble même avoir donné lieu à cette interprétation, lorsqu’il s’est expliqué sur cela plus nettement, ni contre les anciens Théologiens, je dis même Scholastiques, que la plûpart des nouveaux ont quitté en cette matière, comme on les quitte maintenant eux-mêmes ; Dieu veuille qu’ils nous le pardonnent, comme on leur pardonne : Toute cette remarque fut justement censurée par les Théologiens de la Faculté de Paris. Cette doctrine est Luthérienne, contraire aux paroles précises de Jesus-Christ en S. Jean Ch. xx, v. 23. Ceux dont vous aurez remis les péchés, leurs péchés leur seront remis ; condamnée par le saint Concile de Trente Sess. xiv. Ch. vi, & Can. 9, & contraire à la Tradition. Voyez Tertull. de Pudic. S. Cyprien de Laps. & la troisième lettre de Pacien. Voyez le mot de Contrition.

Le Jésuite Dandini traite fort mal les Grecs sur la manière dont ils donnent l’absolution aux pénitens. Un homme, dit-il, au chap. 7 de son voyage du Mont Liban, s’étant confessé d’un péché commun & ordinaire, fut renvoyé par le Confesseur, qui lui refusa de l’absoudre, à moins qu’il n’appellât sept autres Prêtres. Ceux-ci ayant été attirés par quelqu’argent, firent étendre à terre le pénitent, comme s’il eût été mort, & ils lui donnerent enfin l’absolution, en récitant de certaines prières. Ils ont accoûtumé de demander de l’argent pour l’absolution, & de la refuser quand on ne leur en donne point. Car ils prétendent qu’il leur est dû quatre ou cinq écus & davantage pour les péchés communs & ordinaires. La pénitence qu’ils donnent pour les gros péchés, c’est de défendre la Communion pour quatre ou cinq ans. Peut-être font-ils cela par mépris, & par l’aversion qu’ils ont pour l’Eglise Latine, qui l’ordonne tous les ans.

M. Simon, dans ses Remarques sur le voyage du Mont Liban, imprimé à Paris, justifie la pratique des Grecs dans le Sacrement de Pénitence. Si les Grecs, dit-il, différent de donner l’absolution aux pénitens, ils suivent en cela l’usage de leur Eglise, qui est très-ancien : ils ont leurs livres pénitentiaux qui les règlent, & ce n’est point leur caprice qui leur fait imposer une pénitence plutôt qu’une autre : mais ils suivent les Canons, & ils appellent faire le Canon, ce que nous appelons ordinairement faire la pénitence. Ils éloignent souvent leurs Pénitens de la Communion pour un an, pour deux ans, & même pour davantage, suivant en cela les anciens Canons. Si les Grecs ne passent point leur Canon, ou leurs anciens livres pénitentiaux, M. Simon a raison ; mais il est certain qu’ils y ajoutent souvent beaucoup, & qu’il se glisse parmi eux bien des abus dans l’administration de ce sacrement.

On ne doit pas aussi traiter les Grecs d’ignorans & de superstitieux, parce qu’un Confesseur refuse de donner l’absolution à un pécheur, s’il n’a auparavant fait venir sept Prêtres qui donnent tous ensemble l’absolution. Cette façon paroît étrange à ceux qui ne consultent que l’usage présent : mais si l’on remonte jusqu’aux anciens temps, on trouvera que cela s’observoit même dans Rome. Le Pape Corneille assembla les Prêtres & les Evêques qui étoient alors dans Rome, pour délibérer de la Pénitence qu’on devoit donner à quelques Schismatiques qui rentroient dans l’Eglise. Il n’est donc pas surprenant qu’un Papas ou Prêtre