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quelqu’un pour servir de quittance. Avant son départ, il m’a laissé son blanc pour recevoir sa pension.

Blanc signé, ou Blanc seing, papier que l’on donne à quelqu’un pour le remplir à volonté. Papier que l’on donne à des Arbitres, ou à des personnes de confiance pour le remplir des conditions qu’ils jugeront à propos. Potestas rei gerendæ ad arbitrium. On le dit aussi de tout acte où on laisse quelques lignes en blanc, que l’on confie à la discrétion de quelqu’un pour le remplir, soit d’une quittance, soit d’une rescription, soit de quelque autre chose.

En Blanc, adv. se dit en ces phrases. Procuration, quittance en blanc, où on laisse le nom en blanc, de celui qui doit agir, ou recevoir. Pura tabula cum Chirographo. Ce mot est en blanc, c’est-à-dire, il y a de l’espace pour le mettre, lorsqu’il n’a pas été rempli. On le dit aussi de ce qui a été omis.

Un livre en blanc, est un livre en feuilles sans reliure. Folia dissoluta. Rôtisseur en blanc, celui qui vend les viandes lardées, & non rôties. On dit aussi que des étoffes, des chapeaux, sont en blanc, lorsqu’ils n’ont point passé par la teinture.

Blanc. s. m. signifie encore une marque blanche, ou noire, qu’on met à un but pour tirer de l’arc ou du fusil. Signum. Tirer au blanc, donner dans le blanc. Tirer de but en blanc, c’est du lieu marqué où l’on est, tirer droit dans le blanc où l’on vise. Quand un arc est trop lâche, on ne sauroit donner dans le blanc, si on ne prend sa visée beaucoup plus haut. Ab. Regnier.

On dit proverbialement d’un homme qui est entre deux vins, qu’il est entre le blanc & le clairet. On dit qu’un homme a mangé son pain blanc le premier ; pour dire, qu’il a été nourri délicatement dans sa jeunesse, & qu’il aura bien des maux, des fatigues à essuyer dans la suite. On dit qu’un homme se fait tout blanc de son épée ; pour dire, qu’il se promet de faire bien des choses, où souvent il ne peut pas réussir ; & de celui qui est extrêmement heureux en toutes choses, que c’est le fils de la poule blanche. On dit aussi que des personnes se mangent le blanc des yeux ; pour dire, qu’elles sont extrêmement ennemies. On dit aussi, qu’un homme est réduit au bâton blanc, ou absolument, réduit au blanc, quand il est devenu extrêmement pauvre & misérable ; qu’il est au blanc, lorsqu’il n’a pas un sou. Il se dit principalement des joueurs qui ont perdu tout leur argent ; on dit aussi, par menace, je te mettrai au blanc, c’est-à-dire, je te ruinerai. On dit aussi qu’un homme passe du blanc au noir ; pour dire, qu’il la faut faire absolument de gré ou de force. On dit aussi, dire une chose de but en blanc à quelqu’un ; la dire hardiment, sans façon, sans considérer s’il l’aura agréable ou non. On dit aussi à celui qui promet de faire une chose impossible, qu’en ce cas on lui donnera un merle blanc. Les voyageurs disent aussi, rouge au soir, blanc au matin, c’est la journée du pélerin. Les joueurs d’échecs disent, dame blanche a le cul blanc ; pour dire, que le Roi blanc doit être posé d’abord sur une case noire. On dit aussi, pour marquer l’égalité de deux choses, que c’est bonnet blanc & blanc bonnet.

Les Blancs. Nom d’une faction qui se forma dans la ville de Pistoie, en Italie, l’an 1300. Ceux de la faction contraire furent appelés les Noirs. Le Poëte Dante étoit de la faction des Blancs ; & parce que Charles de Valois, frere de Philippe le Bel, & Vicaire de l’Empire dans la Toscane, chassa les Blancs de Florence, dont ils s’étoient emparés, Dante, qui fut chassé avec eux, se déchaîna contre les François. C’est la cause de ses invectives, & des contes injurieux & faux qu’il écrivit contre eux.

On distingue encore dans plusieurs pays des Indes les Blancs & les Noirs. On appelle Blancs les Européens, ou d’autres peuples moins basanés que les naturels du pays. Ainsi dans l’Inde les Blancs sont les Mogols, & les Noirs sont les Indiens. Les Blancs, dans l’île de Madagascar, sont les Zafferamini, & les Casimonibous qui y sont venus d’Arabie ; & les Noirs sont les naturels de l’île.

La Confrérie des Blancs. Alborum ou Canamorum confraternitas. C’est à Naple une Confrérie dont le principal emploi est d’assister les criminels que l’on conduit au supplice, pour les exhorter à faire une bonne mort. P. Helyot, T. VII, p. 105.

Blancs. Imposteurs qui parurent en Italie, vers la fin du XIVe siècle, ainsi nommés parce qu’ils portoient des robes blanches. Voici ce qu’en écrit Thierry de Niem, témoin oculaire. L’an 10 de Boniface IX, vinrent d’Ecosse en Italie, certains Imposteurs, habillés de robes blanches, qui portoient des croix fabriquées de briques, fort artistement travaillées, d’où ils exprimoient du sang qu’ils y avoient fait entrer adroitement. Ils disoient que l’un d’entr’eux étoit Elie venu du Paradis pour annoncer la fin du monde, qui alloit périr par un tremblement de terre. Ils parcoururent presque toute l’Italie, & se firent un grand nombre de disciples, auxquels ils inspiroient de faire des pélerinages. Ils couchoient par-tout où la nuit les rencontroit, hommes, femmes, garçons & filles tout pêle-mêle. Leur prédication contribua d’abord à la réforme des mœurs, mais leur imposture ayant été découverte, tous ces faux Pénitens furent dissipés. Niem, de Schism. l. 2. c. 26. S. Antonin, Platine, le Pogge, Arétin, &c. en parlent aussi.

Blancs-battus. Confrèrie de Pénitens établie par le Roi de France Henri III, mais qui ne dura pas long-temps. Elle étoit composée des plus grands Seigneurs de la Cour, & particulièrement des mignons du Roi. On lit dans le Journal d’Henri III, que la Chapelle du S. Esprit servoit à cette fameuse Confrèrie des Blancs-battus. Leur habit étoit blanc, & d’une forme bizarre & extraordinaire. C’étoient de grands sacs qui couvroient tout le corps, n’ayant que deux trous pour laisser la vue libre. Les freres de cette Confrèrie affectoient des austérités très-rigoureuses, jusqu’à faire des processions à pied, depuis le Couvent des Chartreux de la rue d’Enfer, où étoit leur assemblée, jusqu’à l’Eglise de Notre-Dame de Chartres à dix lieues de Paris, en deux jours ; & ce qu’il y a de plus extraordinaire, c’est que le Roi assistoit lui-même à ces processions habillé comme les autres.

BLANCS-MANTEAUX. s. m. pl. Nom que l’on a donné à Paris aux Services ou Religieux serfs de la sainte Vierge, parce qu’ils avoient des manteaux blancs. La maison qu’ils occupoient au quartier du Marais s’appeloit aussi les Blancs-Manteaux, & la rue dans laquelle elle est située, la rue des Blancs-Manteaux. Ce Monastère passa en 1298 aux Guillelmites, qui le cédèrent en 1618 aux Bénédictins de Cluni, qui l’on cédé à leur tour aux Bénédictins de la Congrégation de S. Maur, qui le possedent aujourd’hui ; quoiqu’ils soient habillés tout de noir, eux, leur maison, leur rue conservent encore le nom de Blancs-Manteaux. Voyez Du Breuil. Antiq. De Paris, p. 895, & celles de Malingre, p. 623 ; le P. Héliot, T. III, C. 45. Je viens des Blancs-Manteaux. Je vais à vêpres aux Blancs-Manteaux.

☞ BLANC. (le). Ville de France, en Berri, du côté du Poitou, sur la rivière de Creuse, généralité de Berri. Oblincum, siège d’une élection.

BLANCHAILLE. s. f. Ce mot n’a point de pluriel : c’est un nom collectif qui signifie, fretin, menu poisson. Viles pisciculi. La pêche de nos étangs n’a pas été bonne cette année, on n’y a trouvé que de la blanchaille.

BLANCHARDS. s. m. pl. Nom que l’on donne à certaines toiles de lin, ainsi appelées, de ce que le fil, qui sert à les fabriquer, a été à demi-blanchi, avant que d’être mis en œuvre.

BLANCHÂTRE. adj. m. & f. qui tire sur le blanc. Albicans. Couleur blanchâtre.

BLANCHE. s. f. Nom de femme. Blanca. Blanche de Castille, fille d’Alphonse IXe, & femme de Louis VIII, Roi de France, disoit souvent à S. Louis son fils, qu’elle eût mieux aimé le voir mort, que souillé d’un seul péché mortel.

Blanche. Reine Blanche. Nom que l’on a donné aux veuves de nos Rois. Le P. Ménestrier prétend que ce nom leur fut donné à cause de la coiffure qu’elles