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BON

aussi un accueil favorable, doux, riant, un témoignage qu’on donne à ses amis, qu’ils sont les bienvenus. Vultus hilaris, læta front as placida.

Bon, sert quelquefois d’interjection, tant pour faire une exclamation, Bon Dieu ! Bone Deus ! Donne Vierge ! que pour faire une ironie, en se moquant d’une proposition. Vous me menacez, bon, je ne vous crains pas ; ou pour exciter à poursuivre, bon, courage ; bon, suivez. Euge, fortiter, bellè.

Bon, est quelquefois substantif, & désigne la qualité louable de la personne ou de la chose dont on parle. Cet homme a du bon et du mauvais. Le bon de l’affaire, veut dire l’avantage qu’on y trouve. Le bon du conte, c’est le trait plaisant, le sel qui s’y rencontre. Le bon & le beau sont les objets de nos affections. Dans cet ouvrage il y a du bon & du mauvais. On dit aussi, qu’un homme a du bon, du revenant bon dans une affaire ; pour dire, qu’il y a profité. On dit aussi, qu’une armée a eu du bon ; pour dire, qu’elle a eu la victoire, ou quelque avantage sur ses ennemis. On dit aussi, qu’un homme est en ses bonnes ; pour dire, qu’on l’a trouvé dans une disposition favorable d’accorder une demande. On dit aussi, il la lui a gardé bonne ; pour dire, il a conservé son ressentiment jusqu’à une occasion de se vanger. Et on dit, du bon du cœur ; pour dire, sincèrement & avec affection. Trouver son bon, c’est, trouver un parti plus avantageur que celui qu’on avoit auparavant. On dit aussi, cela ne présage rien de bon ; pour dire, c’est l’avant-coureur de quelque mal. On dit encore, faire bon ; pour dire, répondre de quelque chose, assurer qu’elle est. Vous pourrez demeurer méchant garant de tout le mérite dont vous leur avez fait bon en moi. Comtesse de B.

Le bon est toujours fort aimable ;
Il est l’objet de notre cœur,
Rien au monde n’est si flatteur ;
Sous ce nom tout est désirable.

☞ Quand on dit le bon du Roi, le bon du Ministre, le bon d’un Banquier, &c. on entent l’agrément du Roi, le consentement du Ministre, l’acceptation du Banquier. Voyez ces mots.

Bon s. m. Terme de Jardinage. Nom qu’on donne à deux espèces de pommes assez mauvaises. Il y a le gros bon & le petit bon.

Bon. s. m. C’est, suivant Prosper Alpin, dans son Traité des Plantes d’Egypte, le nom qu’on donne en ce pays-là au fruit du café.

Bon. s. m. Terme de relation. C’est le nom d’une fête que les Japonnois célèbrent tous les ans à l’honneur des morts. Ce jour-là on voit à chaque porte des chandelles allumées, & chacun courir aux tombeaux chargé de plats pleins de mets exquis qu’ils offrent aux morts. Ambass. des Holl. au Jap. 1. pag. 114.

Bon, se dit quelquefois absolument & adverbialement. Boire du bon, on sous-entend, vin. Il fait bon vivre en ce pays-là ; pour dire, on y vit à bon marché. On dit aussi, il fait bon vivre, & ne rien savoir, on apprend toujours. Il fait bon battre glorieux, il ne s’en vante pas. Il fait bon être en la compagnie des honnêtes gens. Tenir bon, c’est se défendre avec courage, disputer avec opiniâtreté. Faire bon, promettre de payer pour soi, ou pour autrui. A quoi bon tant de soins, pour dire, que sert-il ? sentir bon, pour dire, exhaler, ou ressentir une odeur agréable. Couter bon, ou bonne ; pour dire, faire quelque grande perte en acquérant quelque chose peu considérable. On dit aussi, tout de bon, à bon essient ; pour dire, sérieusement, & sans jeu ni fiction. On dit aussi qu’un homme trouve bon quelque chose, lorsqu’il l’approuve, qu’il la goûte bien, tant au propre qu’au figuré. Et on dit absolument, bon bon cela, quand il demeure d’accord. On dit aussi, il y fait bon ; pour dire, l’occasion est favorable. Il fait bon avec ce Seigneur ; pour dire, on fait fortune avec lui. On dit aussi, il y fait bon ; pour dire, il y fait sûr, ou pour dire, le temps, l’occasion est favorable pour faire une telle chose. Il fait bon passer le rivière à ce gué. Il fait bon se fier aux gens d’honneur. Ce drap est d’un bon user. On dit au Palais, comme il avisera bon être, comme bon lui semblera.

Bon, se dit proverbialement en ces phrases. Les bons pâtissent pour les mauvais, quand on fait un mauvais jugement de plusieurs personnes du même genre, quoiqu’il y en ait parmi de fort innocens. On dit, que les bons maîtres font les bons valets ; pour dire, qu’il faut qu’il y ait de la douceur & de l’amitié réciproque entre les maître & les valets. Les bons comptes font les bons amis. A tout bon compte revenir. Recevoir une somme à bon compte. On dit aussi, jouer bon jeu, bon argent ; pour dire, qu’il faut bien payer quand on joue sérieusement. On dit aussi, bonne mine & mauvais jeu ; pour dire, ne pas faire paroître tous les chagrins qu’on a dans l’ame, ou cacher ses méchantes affaires. Contre fortune bon cœur, pour dire, qu’il faut de la constance dans les adversités. On dit aussi, à bon entendeur salut, quand on fait quelque reproche ou réprimande à quelquun en paroles couvertes. On dit, avoir bon pied & bon œil ; pour dire, être alerte, avoir l’esprit présent pour ne se pas laisser surprendre, prendre garde à tout. On dit, bon jour, bonne œuvre ; pour, dire que les méchans prennent l’occasion des bonnes Fêtes pour faire leurs crimes, lorsqu’on s’en défie le moins. On dit, à bon chat, bon rat, de ceux qui se battent avec forces égales. On dit aussi d’un homme doux & simple, que c’est un bon Prince. On dit aussi, mettre quelqu’un sur le bon pied, non-seulement pour établir sa fortune, & le faire paroître avec éclat, mais encore pour le mettre en disposition d’obéir, de ne point contredire. On dit aussi, à quelque chose malheur est bon ; pour dire, qu’un habile homme peut profiter des malheurs qui lui arrivent. On dit aussi à un homme qui fait trop de cérémonie pour se couvrir, couvrez-vous, la chaleur vous est bonne. On dit aussi, qu’un homme n’est bon à rien, n’est bon qu’à noyer, n’est bon ni à rôtir, ni à bouillir, n’est bon à aucune sauce ; pour dire, que c’est un homme inutile, qui n’est propre à quoi que ce soit. On dit aussi, qu’on ne seroit pas bon à jeter aux chiens, si on avoit fait une telle chose ; pour dire, qu’on attireroit l’indignation publique sur soi. On dit aussi, que ce qui est bon à prendre est bon à rendre, de ceux qui s’emparent du bien d’autrui injustément, & par provision. On dit encore, un bon averti en vaut deux ; pour dire, un homme est bien plus fort quand il a pris ses précautions. On dit qu’un valet est allé à la bonne eau, quand il est long-temps à revenir. On dit aussi, qu’un homme ne tirera rien d’un autre par le bon bout ; pour dire, qu’il n’en aura rien que par la force, par la voie de la Justice. On dit aussi, qui bon l’achete, bon le boit ; pour dire, qu’on ne trouve de l’avantage qu’à acheter de bonnes denrées. On dit aussi, tout cela est bel & bon, mais l’argent vaut mieux, à ceux qui apportent des raisons & des excuses pour ne point payer. On dit aussi, qu’un homme est un bon Gaulois ; pour dire, qu’il est à la vieille mode ; qu’il est bon françois ; pou dire, fort affectionné à sa patrie ; &, en bon françois ; pour dire, s’expliquer franchement, & sans rien déguiser. Une bonne suite vaut mieux qu’une mauvaise attente. On disoit autrefois, bon prou vous fasse, je souhaite que cela vous profite.

☞ BONA. Ville maritime d’Afrique, au royaume d’Alger, près des frontières de Tunis.

☞ BONACE. s. f. Ce mot signifie la même chose que calme, tranquillité. On ne le dit guère qu’en parlant de la mer, & désigne l’état où est la mer quand elle est calme, quand elle n’est point agitée. Malacia. Si vous aimez les pleonasmes, vous direz avec les Vocabulistes, état tranquille & calme de la mer quand elle n’est pas agitée. On craint la bonace. En bonace le vaisseau n’avance point.

BONASIEN. On donna le nom de Bonasiens dans le quatrième siècle à des hérétiques, qui soutenoient que J. C. n’étoit fils de Dieu que par adoption. Moréri, après Baronius.

☞ BONASSE. adj. de t. g. Terme du style familier qui désigne un homme simple, sans malice, & communément sans esprit. Il est bonasse : elle est bonasse : tout bonasse.