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ETR


par la sécheresse. La rue en cet endroit va en s’étrécissant.

Etrécir un cheval. Terme de Manége. C’est en resserrer la piste, le ramener insensiblement sur un terrein moins étendu que celui qu’il parcouroit.

☞ s’Etrécir, se dit du cheval qui ne va pas assez large, qui en se resserrant lui-même s’approche trop près du centre de la volte, & fausse ainsi les lignes qu’il devroit décrire.

Etrecir, se dit figurément. Si on ne surmonte cet éloignement, & ce dégoût qu’il est facile à tout le monde de concevoir de toutes les choses qui paroissent un peu subtiles & scolastiques, on étrécit insensiblement son esprit, & on le rend incapable de comprendre ce qui ne se connoît que par l’enchaînement de plusieurs propositions. Log. Il semble que les têtes des plus grands hommes s’étrecissent lorsqu’elles sont assemblées, & que là où il y a plus de sages, il y ait moins de sagesse : les grands corps s’attachent toujours si fort aux minuties, que l’essentiel ne va jamais qu’après. Montesq.

ÉTRECI, ie. part. & adj. Du Cange dit que dans la basse Latinité on a dit estreciatas ; pour dire, arctatus, étréci.

ÉTRECISSEMENT. s. m. Action par laquelle on étrécit. Coarctatio, contractio. L’étrecissement du canal de la rivière par les quais fait remonter l’eau, peut causer des inondations.

ÉTRECISSURE. f. f. Action par laquelle on étrécit, ou plutôt état de ce qui est étréci. Coarctacura. L’étrécissure de cet habit est nécessaire. Etrecissure de terre, Terræ fauces, lingua, angustiæ. Etrecissure de cœur. Pomey. Ce mot n’est plus d’usage.

ÉTREIGNOIRS. s. m. Ce sont deux morceaux de bois percés de plusieurs trous, joints avec des chevilles. Ils servent au même usage que le sergent, pour emboîter des portes, ou autres choses.

ÉTREIN. s. m. Stramen. Foarre ou paille fourragée, qu’on met sous le ventre des chevaux pour leur servir de litière. Il n’est pas d’usage.

Ce mot vient du Latin Stramen, signifiant la même chose.

ÉTREINDRE. v. a. J’étreins, j’étreignois, j’étreignis, j’ai étreint, j’étreindrai, que j’estreigne, j’estreindrois, que j’étreignisse. Serrer fortement. Constringere, stringere. Hercule tua Antée en l’étreignant fortement On étreint, on ferre les nœuds, les cordes avec un garrot. On le dit particulièrement de ce qu’on serre en liant. Etreindre une gerbe, un fagot.

Ce mot vient stringere. Mén.

Etreindre, se dit figurément en Morale. Conjungere, unire. Cette double alliance a étreint l’amitié de ces deux familles. L’intérêt commun étreint les nœuds de la société. Saint Paul dit que la charité de J. C. nous étreint.

On dit proverbialement, qui trop embrasse, mal étreint ; pour dire, qu’il ne faut pas faire plusieurs entreprises à la fois. On dit aussi, Plus il gèle, plus il étreint  ; pour dire, Plus un mal continue, & plus on en est accablé, plus il est difficile de le supporter.

☞ ÉTREINT, einte. part.

ÉTREINTE, s. f. Action par laquelle on serre, on étreint. Serrement. Constrictio, constrictura. On s’en sert tant au propre qu’au figuré. L’étreinte de ce ballot croit trop lâche. L’étreinte des Amans est bien plus forte que celle des amis ; mais elle dure moins. On lui a donné deux ou trois étreintes de corde ; pour dire, des coups de fouet. Etreinte de ceinture, &c. Affrictoria, fibula. Pomey. Ce mot est vieux & hors d’usage.

ETRENNE. s. f. Présens que l’on se fait le premier jour de l’année. Xenia, strena. Dans ce sens, on se sert ordinairement de ce mot au pluriel. Donner, recevoir des étrennes. Les Poëtes donnent des vers pour étrennes.

Cy gît dessous ce marbre blanc
Le plus avare homme de Rennes,



Qui mourut tout exprès le dernier jour de l’an
De peur de donner les étrennes.

Après tant de cruelle peines,
Que vos rigueurs m’ont fait souffrir,
S’il faut vous donner des étrennes,
C’est un cœur qui s’en va mourir.

☞ Ce mot vient du Latin Strenæ, qui signifie la même chose, & qui a été formé du mot Strenuus, parce que ces présens Strenuis viris dabantur.

On rapporte l’origine des étrennes au temps de Romulus, & de Tatius, Roi des Sabins, qui régnèrent ensemble dans la ville de Rome, l’an 7. de la fondation. On dit que Tatius ayant reçu comme un bon augure, des branches coupées dans un bois consacré à la Déesse Strenua, Déesse de la Force, & qu’on lui présenta le premier jour de l’an, autorisa cette coutume dans la suite, & donna le nom de Strenæ à ces présens, à cause de cette Déesse, qui présida depuis à la cérémonie des étrennes. Les Romains firent de ce jour-là un jour de Fête, qu’ils dédièrent au Dieu Janus qu’on représentoit avec deux visages, comme regardant l’année passée & celle où l’on entroit. Ce jour-là on se souhaitoit une heureuse année les uns aux autres. Les présens ordinaires étoient des figues, des dattes de palmier & du miel ; & chacun envoyoit ces douceurs à ses amis, pour leur témoigner qu’on leur souhaitoit une vie douce & agréable. Les figues & les dattes étoient ordinairement couvertes de feuilles d’or ; ce qui n’étoit pourtant que le présent des personnes moins riches. Les Cliens, c’est-à-dire, ceux qui étoient sous la protection des grands, portoient ces sortes d’étrennes à leurs patrons, & y joignoient quelque pièce d’argent. Sous Auguste, le peuple, les Chevaliers & les Sénateurs lui présentoient des étrennes, & lorsqu’il étoit absent, ils les portoient dans le Capitole. L’argent des étrennes étoit employé à acheter des statues de quelques Divinités. Tibère défendit par un édit les étrennes passé le premier jour de l’an, parce que le peuple s’occupoit de cette cérémonie pendant huit jours. Caligula déclara au peuple qu’il accepteroit celles qu’on lui présenteroit. Claude son successeur, détendit qu’on l’importunât de ces présens. Cette coutume se conserva parmi le peuple. Les Grecs empruntèrent cet usage des Romains.

☞ Dans les premiers siècles de l’Eglise, la coutume d’envoyer des étrennes aux Magistrats & aux Empereurs ne laissa pas de s’observer. Les Conciles & les Pères déclamèrent fort contre cet abus. Ils les appeloient Calendes, du nom général qui signifioit le premier jour du mois, mais l’Eglise n’a point condamné cette coutume depuis que ces étrennes n’ont plus été que des marques d’amitié & de soumission, & que l’on s’est abstenu des cérémonies payennes, comme de présenter de la verveine ou de certaines branches d’arbres, de chanter, de danser dans les rues. &. Mor. qui cite différens Auteurs.

Étrenne, chez les Marchands, se dit figurément de la première marchandise qu’ils vendent chaque jour ; & chez les mendians, de la première aumône qu’ils reçoivent. Un Marchand dit qu’il fait bon marché, à cause que c’est son étrenne. Il prend prétexte de ne point faire crédit, parce que c’est son étrenne :

Étrenne, se dit aussi des choses neuves dont on commence à se servir. Vous aurez L’étrenne de ces meubles, de cette chambre. Il a bien plu sur cet habit neuf : c’est son étrenne ; il a été tout gâté pour son étrenne.

On dit proverbialement, A bon jour, bonne étrenne, quand il nous arrive quelque chose d’heureux en un bon jour.

ÉTRENNER. v. a. Donner des étrennes. Dare Xenia. J’ai été étrenné par des aubades. Il m’a coûté tant à étrenner tous ceux qui sont venus me voir.