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Quangcheu, premiere métropole de la province. Latit. 31. 47. (D. J.)

SINO le, (Géog. mod.) riviere d’Italie, au royaume de Naples. Elle a sa source dans la Basilicate & dans l’Apennin, aux confins de la Calabre, & va se jetter dans le golphe de Tarente, près de la tour de Saint-Basile. (D. J.)

SINOIS, (Mythol.) surnom de Pan, pris du nom de la nymphe Sinoë, qui, soit en particulier, soit de concert avec ses compagnes, prit soin de l’éducation de ce dieu. (D. J.)

SINONIA, (Géog. anc.) île de la mer de Thyrrène, selon Pomponius Mela, l. II. c. vij. & Pline, l. III. c. vj. On croit que c’est à-présent l’île de Salone, aux environs de Gaëte. (D. J.)

SINOPE, terre de, (Hist. nat. anc.) terre rouge-brune de Natolie, qu’on ne connoît plus aujourd’hui.

Quand Voiture, dans ses entretiens avec Costar, dit plaisamment que les cordonniers ont été ainsi nommés parce qu’ils donnent des cors, il me rappelle l’étymologie sérieuse de Ménage, qui dérive sinople, terme de blason, de la terre de Sinope, qu’il suppose verte, & qui étoit d’un rouge-brun. Les anciens ont bien fait mention de la terre verte de Scio qu’ils estimoient beaucoup, mais non pas de la terre verte de Sinope. Je ne sais même si le mot prasinus dans Pline & dans Isidore signifie la couleur verte, que nous appellons sinople ; mais cela ne nous fait rien.

La terre de Sinope étoit une espece de bol plus ou moins foncé en couleur rouge-brune, qu’on trouvoit aux environs de cette ville de la Natolie, qui en distribuoit à Rome une grande quantité pour divers arts : c’est pourquoi Strabon, Pline & Vitruve en ont beaucoup parlé.

Ce qui marque que cette terre n’étoit autre chose que du bol, c’est que les auteurs que l’on vient de citer, assurent qu’il étoit aussi beau que celui d’Espagne. Tout le monde sait que l’on trouve un très beau bol rouge-brun en plusieurs endroits de ce royaume, où on l’appelle almagra ; & ce bol d’Espagne, suivant les conjectures de Tournefort, qui devoit en être instruit, ayant voyagé dans le pays, est un safran de Mars naturel. L’on ne connoît plus aujourd’hui sur les lieux, ni la terre verte de Scio, ni la rouge de Sinope, appellée rubrica fabrilis par Vitruve, Perse & autres auteurs.

La terre sinopique de nos jours, notre rubrique, est une terre rouge qui se trouve en Grece en Arménie, en Egypte, dans les îles de Majorque & de Minorque, en France, en Allemagne & Angleterre. Il y en a de plusieurs especes, de graisseuses, de seches, de tendres, de dures, de tachées, &c. Elles servent aux ouvriers pour crayonner & tirer des lignes rouges.

C’est de cette terre que vient le nom de rubrique, qu’on donne au titre d’un livre de droit, parce que les titres en étoient autrefois écrits en lettres rouges. C’est la même origine de ce qu’on nomme rubriques générales dans l’office divin, & finalement puisque j’en suis sur les étymologies, c’est aussi là celle du mot de brique, terre grasse, rougeâtre, que nous cuisons, après l’avoir façonnée en carreaux, & qui sert à bâtir.

Les Anglois savent à merveille pulvériser, tamiser & réduire en pâte, avec une eau gommée, leur terre rouge, dont ils font des crayons qu’ils débitent dans le commerce ; mais nous vanter la rubrique, & toute autre sorte de terres, bols, craies, pierres de mine, &c. quelle qu’en soit la couleur, pour être utiles en médecine, en recommander les vertus vulnéraires intérieurement, c’est se moquer du monde, c’est aggréger ceux qui exercent l’art d’Esculape, au corps des petits marchands de

crayons, qui étalent à Londres sur la bourse, ou à Paris sur le pont-neuf. (D. J.)

Sinope, (Géog. anc.) ville de Paphlagonie, située au 43e degré de latitude septentrionale, sur le bord méridional du Pont-Euxin, près d’une riviere du même nom, à quelques milles en deçà de l’Halys, fut une des villes des plus célebres & des plus anciennes du royaume de Pont, dont la Paphlagonie, province entre l’Halys & le Parthenius, faisoit partie. Ovide de Ponto, l. I. dit :

Urbs antiqua fuit, Ponti celebrata Sinope.

J’ai lu, dans les mém. des insc. t. X. in-4°. une excellente dissertation sur Sinope : en voici le précis.

Cette ville, au rapport de plusieurs écrivains, doit sa fondation à Sinope, une de ces amazones fameuses qui habitoient le long des rivages du Thermodon, & que quelques auteurs prétendent avoir été une colonie des Amazones de Lybie, que Sésostris menoit avec lui dans ses expéditions, & dont il laissa, dit-on, une partie sur les bords de cette riviere, lorsqu’il passa dans ces contrées-là.

Mais d’autres écrivains croyent que Sinope, qui fonda en Asie la ville de son nom, étoit grecque d’origine, & fille d’Asope, petit prince établi à Thebes, ou plutôt à Phliasie, où il étoit venu de l’Asie d’auprès des rivages du Méandre : comme il avoit passé la mer pour se rendre en Grece, on en fit, en langage mythologique, un fils de l’Océan & de Téthis, ou de Neptune & de Cégluse ; & le fleuve Asope, à qui il donna son nom, n’étoit autre, suivant le même style, que le Méandre même, qui ayant suivi Asope sous les eaux de la mer, étoit venu reparoître sur les terres que ce prince avoit acquises près de la ville de Phliasie, ou Phigalie.

Pausanias fait mention d’un autre prince, nommé aussi Asope, le plus ancien des rois de Platée après Cytheron. Ce fut lui qui donna son nom à un autre fleuve appelle Asope, qui couloit près de Thèbes, & à l’Asopie, canton des environs de cette ville.

En ce tems-là les dieux, c’est-à-dire, les princes ou seigneurs de quelque contrée, aimoient à se signaler par l’enlevement des jeunes personnes qui étoient en réputation de beauté. Asope le phliasien avoit, dit-on, vingt filles, entre lesquelles il s’en trouvoit quelques-unes dont le mérite & la beauté faisoient beaucoup de bruit jusque dans les pays étrangers. Ce fut entre le jeunes seigneurs d’alors, à qui en enleveroit quelqu’une. Le petit souverain de l’île d’Oënone, qu’on qualifie du nom de Jupiter, se saisit d’Egine, dont il eut Eacus, pere de Pelée, qui le fut d’Achille, & l’île d’Oënone fut depuis appellée Egine. Le seigneur d’une autre île, qu’on honora du nom de Neptune, parce qu’il avoit passé la mer, surprit Corcyre, qu’il emmena dans son île de Schérie, qu’on nomma dans la suite Corcyre, à-présent Corfou. Un autre corsaire, qu’on titra aussi du nom de Neptune, pour la même raison, s’accommoda de Salamine, qui donna son nom à l’île où il la transporta.

Mars, c’est-à-dire, quelque guerrier, ravit Harpinne, & un jeune aventurier venu du Levant, qu’on décora pour cette raison du nom d’Apollon, surprit Sinope, une des autres filles d’Asope, qu’il transporta jusque dans une péninsule ou Chersonnèse de la côte méridionale du Pont-Euxin, qu’il lui céda, en lui laissant, dit-on, sa virginité. Quelques auteurs prétendent au contraire, beaucoup plus vraissemblablement, qu’il l’épousa, & qu’il en eut un fils nommé Syrus, qui donna son nom à la Syrie.

La situation du lieu où Sinope avoit été transplantée de la Grece, étoit trop charmante pour pouvoir ne s’y pas plaire. Cette princesse s’y fixa donc volontiers, & y jetta les fondemens de la ville de son