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orientale, naquit à Zurich en 1620, & commença à s’ériger en auteur à l’âge de 24 ans, pour attaquer sur une matiere très-épineuse, le célebre p. Morin ; il entreprit de réfuter les dissertations de ce théologien sur le pentateuque samaritain. Ce coup d’essai fut son chef-d’œuvre ; il intitula son ouvrage, exercitationes anti-morinianæ ; & tous les protestans en firent d’autant plus d’éloges, que la matiere ne pouvoit pas être plus favorable à leur façon de penser, puisqu’Hottinger se battoit pour le texte hébreu de la bible, dont le p. Morin énervoit l’autorité de tout son pouvoir. Il voyagea aux frais de la ville de Zurich, dans les pays étrangers, & apprit les langues orientales sous Golius. De retour dans sa patrie, il ne cessa de produire livre sur livre, dont vous trouverez le catalogue dans sa vie écrite par Heidegger. Les principaux sont 1°. historia orientalis : 2°. bibliothecarius quadripartitas : 3°. thesaurus philologicus sacræ Scripturæ : 4°. historia ecclesiastica : 5°. promptuarium sive bibliotheca orientalis : 6°. etymologicum orientale : 7°. dissertationes miscellancæ, &c. Il n’a pas toujours gardé dans ses écrits la modération convenable, & il les a donnés avec trop de précipitation ; mais quoi qu’en dise M. Arnauld, il est plus croyable dans ses disputes que ne l’étoit Allatius, parce qu’il réunit toutes les marques d’un homme de bonne foi. Allatius, grec de nation, & façonné en Italie, a plus de politesse & plus de tour ; mais le zurichois a plus de candeur & de simplicité. Allatius dit de sa tête tout ce qu’il lui plait : Hottinger allegue ses témoins. Enfin Zurich le combla d’honneurs & de distinction ; elle ne voulut que le prêter à l’électeur palatin, pour ranimer les études de l’université d’Heidelberg. Au bout de six ans elle le rappella, & lui confia des affaires importantes. L’académie de Leyde le demanda pour être professeur en théologie, & l’obtint enfin par la faveur des états de Hollande, auxquels Mrs. de Zurich crurent ne pouvoir refuser cette marque de leur condescendance.

Comme il préparoit toutes choses pour son voyage, il périt malheureusement à 47 ans, le 5 Juin 1667, sur la riviere qui passe à Zurich. Il s’étoit mis dans un bateau avec sa femme, trois de ses enfans, son beau-frere, un de ses bons amis, & sa servante, pour terminer le bail d’une terre qu’il avoit à deux lieues de Zurich ; le bateau ayant donné sur un pieu, que la crue de la riviere empéchoit de voir, se renversa. Hottinger, son beau-frere & son ami se tirerent du péil à la nage ; mais ils rentrerent dans l’eau, quand ils apperçurent le danger où le reste de la troupe étoit encore. Ce fut alors qu’Hottinger périt ; son ami & ses trois enfans eurent la même destinée ; sa femme, son beau-frere & sa servante furent les seuls sauvés ; il laissa quatre fils & deux filles qui ne se trouverent pas de ce triste voyage.

Scheuchzer (les) ont tous honoré leur patrie par leurs ouvrages en médecine & en lustoire naturelle. Jean Jacques Scheuchzer mort en 1733, à 61 ans, a donné une physique sacrée ou histoire naturelle de la bible, imprimée à Amsterdam, en quatre volumes in-fol. Jean Scheuchzer son frere fut nommé premier médecin de Zurich, & mourut en 1738. Jean-Gaspard Scheuchzer, fils de Jean-Jacques, est mort avant son pere en 1729, & s’étoit déja fait connoître par une traduction en anglois de la belle histoire du Japon de Kempfer.

Schweitzer (Jean-Gaspar), en latin Suicerus, habile philologue du xvij. siecle, mourut en 1688 à 68 ans. On a de lui un savant lexicon, ou trésor ecclésiastique des peres grecs, & d’autres savans ouvrages. La meilleure édition de son trésor ecclésiastique est celle d’Amsterdam en 1728, en deux volumes in-folio.

Simler (Josias) mort dans sa patrie en 1576, à 45

ans, a donné quelques ouvrages d’histoire & de théologie, outre un assez bon abrégé de la bibliotheque de Conrad Gesner.

Styckius (Jean-Guillaume), littérateur, né en 1542, mourut en 1607. Il s’est fait connoître par plusieurs ouvrages, dont les principaux sont 1°. commentarius in Arriani periplum Ponti-Euxini & maris Erythræi : 2°. de sacrificiis Judæotum & Ethnicorum : 3°. antiquitatum convivalium libri IV. Dans le dernier ouvrage sur les festins des anciens, l’auteur traite avec érudition la maniere dont les Hébreux, les Chaldéens, les Grecs, les Romains & plusieurs autres nations faisoient leur repas d’apparat, & les cérémonies qu’ils y observoient. (Le chevalier de Jaucourt.)

Zurich, canton de, (Géog. mod.) canton de la Suisse, & le premier en rang. Il est borné au nord par le Rhin, qui le sépare du canton de Schafhouse ; au midi par le canton de Schwitz, au levant par le Thourgaw & le comté de Toggenbourg, & au couchant par le canton de Zug.

Le territoire de ce canton fait partie du pays des anciens Tigurini, célebres dans l’histoire romaine ; car plusieurs années avant que Jules-César commandât dans les Gaules, les Tigurini avoient défait l’armée romaine, & tué le consul Lucius Cassius qui la commandoit, & son lieutenant Pison qui avoit été consul. Leur pays appellé anciennement pagus Tigurinus, s’étendoit jusqu’au lac de Constance ; les anciens y marquent deux villes, l’une appellée forum Tiberii, & l’autre Arbor fælix, qui est Arbon. Sous les rois francs, le Pagus Tigurinus s’appella Durgau ou Turgau, dans lequel pays de Turgau étoit Turig aujourdhui Zurich, comme il paroît par une charte de Louis le germanique. Cette même charte nous apprend que l’on avoit commencé à prononcer Zurige pour Turige, suivant la coutume teutonique, où l’on change le T en Z.

Quand les cantons de la Suisse formerent une alliance fédérative, ils céderent la préséance au canton de Zurich, à cause de la puissance, de la grandeur & de la richesse de la ville de Zurich. Ce canton conserve encore cet honneur d’avoir le titre de premier entre les égaux ; il ne préside pas seulement aux dietes, mais il a le soin de les convoquer, en écrivant des lettres circulaires aux cantons, pour les informer des raisons au sujet desquelles on les assemble, & pour les prier d’envoyer leurs députés avec les instructions nécessaires. La ville de Zurich est comme la chancellerie de la Suisse, & c’est par ce motif que toutes les lettres des souverains y sont portées.

Le canton de Zurich est d’une étendue considérable, & c’est le plus grand de la Suisse après celui de Berne. On distingue les baillifs qui le gouvernent, en trois classes : ceux de la premiere sont appellés administrateurs ; ils ont soin de recevoir les rentes, sans exercer aucune jurisdiction, & ils sont au nombre de dix : la seconde classe comprend les baillifs qui demeurent dans la ville de Zurich, & qui ne sont point obligés d’en sortir : ce sont ceux qu’on nomme baillifs intérieurs, & on en compte dix-neuf ; la troisieme classe est celle des baillifs qui résident dans les villages & dans les châteaux du canton, pour y exercer leur emploi ; & ceux-ci sont au nombre de treize. On compte cinq bailliages hors de l’enceinte du canton, & ces bailliages ont chacun leurs lois & leurs coutumes, auxquelles les baillifs ne peuvent rien changer dans l’administration de la justice. Il y a encore deux villes assez considérables, savoir Stein sur le Rhin, & Wintherthour, qui sont soumises à la souveraineté de Zurich, mais qui en même tems nomment leurs propres magistrats, & se gouvernent selon leurs lois.