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assûrer qu’il est ancien. Voyez Médaille.

Nous nous servons de deux sortes de caracteres pour l’impression des livres ; 1o. le romain ; 2o. l’italique. Nous avons aussi deux sortes d’écritures à la main ; 1o. la batarde, qui est le plus en usage, & que les maîtres appellent aussi italienne ; 2o. la ronde ou financiere nommée aussi françoise. Voyez plus bas Caracteres d’écriture, & fonderie en Caracteres.

Les caracteres numéraux sont ceux dont on se sert pour exprimer les nombres ; ce sont des lettres ou des figures, que l’on appelle autrement chiffres. Les especes de caracteres, qui sont principalement en usage aujourd’hui, sont le commun & le Romain : on peut y joindre le Grec & un autre nommé le caractere François, ainsi que les lettres des autres alphabets, dont on s’est servi, pour exprimer les nombres.

Le caractere commun est celui que l’on appelle ordinairement le caractere Arabe, parce que l’on suppose qu’il a été inventé par les Astronomes Arabes ; quoique les Arabes eux-mêmes l’appellent le caractere Indien, comme s’ils l’avoient emprunté des peuples de l’Inde.

Il y a dix caracteres Arabes, savoir, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 0, dont le dernier s’appelle en latin cyphra ; en France, on donne en général le nom de chiffre à tout caractere, qui sert à exprimer les nombres. Voyez Chiffre.

On se sert du caractere Arabe presque dans toute l’Europe, & presque dans toutes les circonstances où il peut avoir lieu, en fait de commerce, de mesure, de calculs Astronomiques, &c.

Le caractere Romain est composé de lettres majuscules de l’alphabet Romain, d’où probablement lui est venu son nom : ou, peut-être, de ce que les anciens Romains en faisoient usage sur leurs monnoies, & dans les inscriptions de leurs monumens publics, érigés en l’honneur de leurs divinités, & de leurs hommes illustres ; de même que sur leurs tombeaux, &c.

Les lettres numérales, qui composent le caractere Romain, sont au nombre de sept, savoir, I, V, X, L, C, D, M.

Le caractere I, signifie un ; V, cinq ; X, dix ; L, cinquante ; C, un cent ; D, cinq cents ; & M, un mille.

Le I, répété deux fois, fait deux, II ; trois fois, trois, III ; quatre s’exprime ainsi IV. I, mis devant V ou X, retranche une unité du nombre exprimé par chacune de ces lettres.

Pour exprimer six, on ajoûte I à V, VI ; pour sept, on y en ajoûte deux, VII ; & pour huit, trois, VIII : on exprime neuf, en mettant I devant X, IX, conformément à la remarque précédente.

On peut faire la même remarque par rapport à X devant L ou C ; ce X indique alors qu’il faut retrancher dix unités du nombre suivant ; ainsi XL signifie quarante, & XC, quatre-vingt-dix ; une L suivie d’un X, signifie soixante, LX, &c. On a désigné quelquefois quatre cents par CD, mais cela est rare.

Outre la lettre D, qui exprime cinq cents, on peut encore exprimer ce nombre par un I devant un C renversé, de cette maniere IↃ ; de même au lieu de M, qui signifie un mille, on se sert quelquefois de I entre deux C, l’un droit & l’autre renversé, en cette sorte CIↃ ; suivant cette convention, on peut exprimer six cents par IↃC, & sept cents par IↃCC, &c.

L’addition de C & devant & après, augmente CIↃ en raison décuple ; ainsi CCIↃↃ, signifie 10000 ; CCCIↃↃↃ, 100000, &c.

Ceci est la maniere commune de marquer les nombres, anciennement usitée par les Romains, qui exprimoient aussi tout nombre de mille par une ligne, tirée sur un nombre quelconque moindre que mille.

Par exemple V signifie 5000 ; LX, 60000 ; pareillement M est 1000000 ; MM est 2000000, &c.

Outre cela, 1o. certaines libertés ou variations ont été admises, au moins dans quelques écrivains modernes ; par exemple IIX, signifie 8 ; IICIX, 89 ; 2o. certains caracteres ont été en usage, qui semblent avoir du rapport aux lettres ; par exemple M, par lequel on exprime mille, 1000, a été formé de CXↃ, ou CIↃ, dont la moitié, c’est-à-dire, IↃ étoit prise pour 500 ; de même, afin d’avoir peut être plus de commodité pour écrire, IↃ semble avoir été changé en D. Nous ignorons au reste comment les Romains faisoient leurs calculs par le moyen de ces nombres. Ils avoient sans doute une Arithmétique comme nous, & peut être ne seroit-il pas impossible de la retrouver : mais ce seroit une recherche de pure curiosité. Le caractere Arabe qui a prévalu par tout nous en exempte.

Chiffres Grecs. Les Grecs avoient trois manieres d’exprimer les nombres. 1o. La plus simple étoit pour chaque lettre en particulier, suivant sa place dans l’alphabet, afin d’exprimer un nombre depuis α 1, jusqu’à ω 24 : c’est de cette maniere que sont distingués les Livres de l’Iliade d’Homere. 2o. Il y avoit une autre maniere, qui se faisoit par une division de l’alphabet en 8 unités : α 1, ϐ 2, &c. 8 dixaines : ι 10, κ 20, &c. 8 centaines ρ 100, σ 200, &c. N. B. ils exprimoient mille par un point ou un accent sous une lettre ; par exemple, α̣ 1000, ϐ̣ 2000, &c. 3o. Les Grecs avoient une troisieme maniere qui se faisoit par six lettres capitales, en cette maniere, Ι [ια pour μία] 1, Π [πέντε] 5, Δ [δέκα] 10, Η [ἑκατὸν] 100, Χ [χίλια] 1000, Μ [μύρια] 10000. Et quand la lettre Π en renfermoit quelques-unes, excepté Ι, cela montroit que la lettre renfermée étoit le quintuple de sa propre valeur, comme

𐅄 50, 𐅅 500, 𐅆 5000, 𐅇 50000.

Chiffres Hébraïques. L’alphabet Hébreu étoit divisé en 9 unités, א ‎1, ב ‎2 &c. en 9 dixaines, י ‎10, כ ‎20, &c. en 9 centaines, ק ‎100, ר ‎200, &c. ך ‎500, ם ‎600, ן ‎700, ף ‎800, ץ ‎900. Les mille s’exprimoient quelquefois par les unités, que l’on mettoit avant les cents, אךלד, ‎1534, & de même devant les dixaines, אע, ‎1070. Mais en général on exprimoit mille par le mot אלה, & ‎2000 par אלפיﬦ ‎; אלפיﬦ précédé des autres lettres numérales, servoit à déterminer le nombre de mille ; par exemple, גאלפיﬦ,‎ 3000, &c.

Le caractere François, ainsi appellé, à cause que les François l’ont inventé, & en font principalement usage, est plus ordinairement nommé chiffre de compte ou de finance.

Ce n’est proprement qu’un chiffre Romain en lettres non majuscules ; ainsi au lieu d’exprimer 56 par LVI. en chiffre Romain, on l’exprime en plus petits caracteres par lvj. & ainsi des autres, &c.

On en fait principalement usage dans les chambres des comptes ; dans les comptes que rendent les thrésoriers, les receveurs, &c. & autres personnes employées dans l’administration des revenus.

Caracteres d’abréviation. On se sert aussi du mot caractere en plusieurs arts pour exprimer un symbole destiné à communiquer d’une maniere plus concise & plus immédiate, la connoissance des choses. Voy. Abréviation.

Paul Diacre attribue l’invention de ces caracteres à Ennius, qui en a inventé, dit-il, les premiers onze cents. Tyron, affranchi de Ciceron ; Philargyrus ; Faunius & Aquila, affranchis de Mecene, y en ajoûterent un bien plus grand nombre.

Enfin Seneque en fit une collection qu’il mit en ordre, & il augmenta leur nombre jusqu’à cinq mille.