Page:Diogène Laërce - Vies - tome 2.djvu/53

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parce que quoiqu’il jouât mal de cet instrument, il aimait mieux gagner sa vie de la sorte que se mettre à voler. Il saluait un joueur de luth, que tout le monde abandonnait, en lui disant, Bonjour, Coq ; & cet homme lui ayant demandé pourquoi il l’appelait de ce nom, il lui dit que c’étoit à cause qu’il éveillait tout le monde par sa mélodie. Ayant remarqué un jeune garçon qu’on faisait voir, il remplit son giron de lupins[1], & se plaça vis-à-vis de lui : sur quoi le monde qui étoit là, ayant tourné la vue sur Diogène, il dit qu’il s’étonnait de ce qu’on quittait l’autre objet pour le regarder. Un homme fort superstitieux le menaçait de lui casser la tête d’un seul coup. Et moi, lui dit-il, je te ferai trembler en éternuant de ton côté gauche. Hégésias lui ayant demandé l’usage de quelqu’un de ses écrits, il lui dit : Si tu voulais des figues, Hégésias, tu n’en prendrais pas de peintes ; tu en cueillerais de véritables. Il y a donc de la folie en ce que tu fais de négliger la véritable manière de t’exercer l’esprit pour chercher la science dans les livres. Quelqu’un lui reprochait qu’il étoit banni de son pays : Misérable ! dit-il, c’est là ce qui m’a rendu Philosophe. Un autre lui disant pareillement, « Ceux de Sinope t’ont chassé de leur pays », il répondit, Et moi je les ai condamnés à y rester. Il vit

  1. Légume amer, un peu plus gros qu’un pois.