Page:Doyle - La Vallée de la peur.djvu/128

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vie, le dur labeur, la dure énergie de l’homme. Le jeune voyageur considérait avec une répulsion mêlée de curiosité ce paysage qu’on sentait nouveau pour lui. On le voyait, par instants, tirer de sa poche une grande lettre qu’il consultait, et en marge de laquelle il griffonnait des notes. Une fois, sa main alla chercher derrière sa ceinture un objet qu’on ne se fût guère attendu à trouver chez un homme de manières si douces : c’était un pistolet de marine, et du plus grand modèle. Comme il le présentait de biais à la lumière, un rayon accroché par le cuivre des cartouches montra que pas une balle ne manquait au barillet. Il se hâta de le faire disparaître, mais il ne s’y prit point si lestement qu’il n’eût été remarqué d’un ouvrier assis sur la banquette adjacente.

« Hé ! hé ! camarade ! on est armé jusqu’aux ergots, à ce qu’il me semble ? »

Le jeune homme sourit d’un air confus.

« Oui, dit-il, ça sert quelquefois au pays d’où j’arrive.

— Et vous arrivez ?

— De Chicago, en dernier lieu.

— Étranger, alors ?

— Je viens ici pour la première fois.

— Eh bien, vous vous apercevrez qu’ici comme ailleurs ça n’est pas inutile.

— Ah ! vraiment ? fit avec intérêt le jeune homme.