Page:Doyle - Le Monde perdu.djvu/52

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piraient la bienveillance. Je le connaissais sous d’autres aspects et m’étonnerais d’autant moins quand viendraient à éclater, dans un ciel serein, de brusques orages. Avec lui, on ne peut ni se sentir tranquille ni s’ennuyer ; on vit dans l’attente des sautes d’humeur.

Nous remontâmes pendant deux jours une importante rivière large de quelques cents yards, et dont l’eau brune a néanmoins assez de transparence pour qu’on en découvre le fond. Une moitié des affluents de l’Amazone présentent cette même particularité ; les autres sont blanchâtres et opaques. La différence tient uniquement à la nature du pays qu’ils arrosent, et au fait qu’ils charrient soit des détritus végétaux, soit de l’argile. Nous rencontrâmes deux fois des rapides, et nous dûmes, chaque fois, pour les éviter, porter nos canots pendant un demi-mille, opération qui s’effectua, d’ailleurs, sans grosse difficulté. La forêt ne se défend pas trop le long des rives ; et pourtant quel mystère, quelle solennité inoubliable !

Les arbres, par leur hauteur, par l’épaisseur des troncs, dépassent tout ce qu’aurait pu concevoir mon imagination citadine.

CONAN DOYLE.


(À suivre.)