Page:Du Deffand - Correspondance complète de Mme Du Deffand avec ses amis, tome 1.djvu/261

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c’était seulement pour l’amuser qu’il lui avait laissé espérer ; au moyen de quoi, cela fait un effet diabolique dans la maison, parce qu’elle s’en prend à son mari de ce qu’elle n’y va point. D’ailleurs tout est dans l’accord le plus parfait. La nouvelle cuisine ne me parait pas avoir pris du tout, et les premiers engagements sont plus forts que jamais. Le chevalier n’entend rien à tout cela. Le maréchal végète, l’abbé du Tailly rit de tout, et la Boissière avait une perruque plus blonde que le soleil. Bonjour ; de vos nouvelles. Bien des respects à madame de Pecquigny.




LETTRE 7.


LE MÊME À LA MÊME.


Paris, mardi 3 juillet 1742.

Enfin, à moins d’un malheur, vous devez être à Forges, vous devez vous y reposer de la fatigue de votre voyage, et vous êtes hors d’inquiétude de l’accident que vous craigniez. J’espère que vous m’écrirez ce matin, et que je recevrai de vos nouvelles jeudi tout au plus tard ; après quoi, si les lettres viennent tous les jours, je saurai exactement votre état. Je suis dans une véritable affliction : on a nouvelle que Mertrud[1] a dû partir de Plombières le 23, qui est le même jour que M. de Nivernois en est parti aussi. C’est aujourd’hui le 3, c’est-à-dire le dixième jour de son départ, et l’on n’en a ni vent ni voie. Toutes les lettres qu’on lui avait écrites à Plombières sont revenues ici ; ce qu’il y a de plus affreux, c’est qu’hier madame de Livry dit au beau-frère de Mertrud que l’on avait écrit qu’il y avait eu un homme d’assassiné à cinq lieues de Plombières. Vous jugez aisément de l’état de sa femme à cette nouvelle ; je courus sur-le-champ chez M. de Maurepas pour savoir comment on pourrait avoir quelques lumières sur cette malheureuse affaire : il attendait M. de Marville[2], qui vint et qui n’avait rien entendu dire, mais qui se chargea d’écrire à M. de Beaupré, à M. de Creil[3] et à M. de la Galaisière ; et puis M. de Maurepas m’avisa d’aller trouver M. du Fort, parce que Mertrud ayant pris la poste, cela le regardait plus particulièrement et qu’il pourrait mieux m’instruire. J’y allai donc : il n’avait

  1. Fameux médecin empirique du temps. (L.)
  2. Lieutenant général de police. (L.)
  3. Jean-François de Creil, intendant de Metz. (L.)