Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/32

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Les ambassadeurs des puissances étrangères sont aussi défrayés aux dépens de l’empereur, depuis le premier jour qu’ils entrent sur les terres de l’empire, jusqu’à ce qu’ils en soient sortis. Il leur fournit des chevaux, des barques, et toutes les voitures nécessaires pour le voyage : il fait toute la dépense de leur table, et quand ils sont arrivés à la cour, il les loge dans un palais, ou pour marque d’amitié il leur envoie tous les deux jours des mets de sa table ; et quand il veut donner des marques particulières de son affection, il envoie de temps en temps des mets extraordinaires.

Je ne parle point des autres dépenses que fait l’empereur pour tous les ouvrages publics, qui peuvent servir ou à l’ornement des villes, ou à la commodité des peuples, ni de celles que demande l’entretien de son palais, qui, quoique d’un goût bien différent de celui que nous avons de l’architecture, ne laisse pas d’avoir quelque chose d’auguste et de convenable à la majesté d’un si puissant prince. L’idée qu’on en a déjà donnée au commencement de cet ouvrage semblerait suffire ; cependant sans répéter ce qui a été dit, je suppléerai à ce qui y manque par une description plus détaillée qu’en a fait un des missionnaires, qui eurent honneur d’être admis en sa présence, et de le saluer jusque dans son appartement.


Palais de l'empereur

« C’est, dit-il, un amas étonnant de bâtiments, et une longue suite de cours, de galeries, et de jardins, qui forment un tout véritablement magnifique.

Comme la porte du midi ne s’ouvre que pour l’empereur, nous entrâmes par celle qui regarde l’occident, et qui conduit à une vaste cour, qui est au midi par rapport au palais. Cette cour a la figure d’une double équerre, à chaque extrémité de laquelle on voit un gros édifice oblong à double toit, dont l’étage d’en bas est percé en trois endroits en forme de porte de ville. Cette cour a Nord-Sud plus de deux cents pas géométriques de long, et la croisée environ autant, elle est pavée de grosses briques posées de champ, avec des allées de pierres plates et larges ; avant que d’entrer dans une autre cour, il faut passer un canal à demi sec qui court Est-Ouest, et qui est parallèle aux murs de cette seconde cour. Nous passâmes ce canal sur un des six ponts de marbre blanc, qui sont vers le milieu, vis-à-vis de cinq portes voûtées et ouvertes, sur lesquelles est un gros édifice avec une plate forme ou donjon à double toit, qui a plus de vingt pas géométriques d’épaisseur. A l’entrée et à la sortie du pont qui conduit à la porte du milieu, il y a deux grandes colonnes rondes de marbre blanc, dressées sur un large piédestal entouré d’une balustrade de même, avec deux gros lions qui ont sept à huit pieds de haut sur leur base, lesquels semblent avoir été faits d’un même bloc.

Les portes conduisent vers le nord dans la seconde cour dont je parle, qui n’a guère que cent pas géométriques de longueur, et environ la moitié de largeur. A l’entrée de cette cour, on trouve deux autres colonnes de marbre blanc ornées de dragons en relief, avec deux petites ailes un peu au-dessous d’un chapiteau plat et fort large.