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LA REINE MARGOT.

sévère ? On va et on vient dans ce palais comme sur une place publique.

Et il appela encore, mais sans obtenir un meilleur résultat que la première fois.

— Allons, marchons devant nous, pensa-t-il ; il faudra bien que je finisse par rencontrer quelqu’un.

Et il s’engagea dans le couloir, qui allait toujours s’assombrissant.

Tout à coup la porte opposée à celle par laquelle il était entré s’ouvrit, et deux pages parurent, portant des flambeaux et éclairant une femme d’une taille imposante, d’un maintien majestueux, et surtout d’une admirable beauté.

La lumière porta en plein sur La Mole, qui demeura immobile.

La femme s’arrêta, de son côté, comme La Mole s’était arrêté du sien.

— Que voulez-vous, Monsieur ? demanda-t-elle au jeune homme d’une voix qui bruit à ses oreilles comme une musique délicieuse.

— Oh ! Madame, dit La Mole en baissant les yeux, excusez-moi, je vous prie. Je quitte M. de Mouy, qui a eu l’obligeance de me conduire jusqu’ici, et je cherchais le roi de Navarre.

— Sa Majesté n’est point ici, Monsieur ; elle est, je crois, chez son beau-frère. Mais, en son absence, ne pourriez-vous dire à la reine… ?

— Oui, sans doute, Madame, reprit La Mole, si quelqu’un daignait me conduire devant elle.

— Vous y êtes, Monsieur.

— Comment ! s’écria La Mole.

— Je suis la reine de Navarre, dit Marguerite.

La Mole fit un mouvement tellement brusque de stupeur et d’effroi que la reine sourit.

— Parlez vite, Monsieur, dit-elle, car on m’attend chez la reine mère.

— Oh ! Madame, si vous êtes si instamment attendue, permettez-moi de m’éloigner, car il me serait impossible de vous parler en ce moment. Je suis incapable de rassembler deux idées ; votre vue m’a ébloui. Je ne pense plus, j’admire.

Marguerite s’avança pleine de grâce et de beauté vers ce