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LA REINE MARGOT.

Marguerite disparut comme une vision.

— Venez-vous, Monsieur ? dit le page chargé de conduire La Mole dans la galerie inférieure.

— Oh ! oui, oui, s’écria La Mole enivré ; car comme le jeune homme lui indiquait le chemin par lequel venait de s’éloigner Marguerite, il espérait, en se hâtant, la revoir encore.

En effet, en arrivant au haut de l’escalier, il l’aperçut à l’étage inférieur ; et soit hasard, soit que le bruit de ses pas fût arrivé jusqu’à elle, Marguerite ayant relevé la tête, il put la voir encore une fois.

— Oh ! dit-il en suivant le page, ce n’est pas une mortelle, c’est une déesse ; et, comme dit Virgilius Maro :


Et vera incessu patuit dea.


— Eh bien ? demanda le jeune page.

— Me voici, dit La Mole ; pardon, me voici.

Le page précéda La Mole, descendit un étage, ouvrit une première porte, puis une seconde, et s’arrêtant sur le seuil :

— Voici l’endroit où vous devez attendre, lui dit-il.

La Mole entra dans la galerie, dont la porte se referma derrière lui.

La galerie était vide, à l’exception d’un gentilhomme qui se promenait, et qui, de son côté, paraissait attendre.

Déjà le soir commençait à faire tomber de larges ombres du haut des voûtes, et, quoique les deux hommes fussent à peine à vingt pas l’un de l’autre, ils ne pouvaient distinguer leurs visages. La Mole s’approcha.

— Dieu me pardonne ! murmura-t-il quand il ne fut plus qu’à quelques pas du second gentilhomme, c’est M. le comte de Coconnas que je retrouve ici.

Au bruit de ses pas, le Piémontais s’était déjà retourné, et le regardait avec le même étonnement qu’il en était regardé.

— Mordi ! s’écria-t-il, c’est M. de La Mole, ou le diable m’emporte ! Ouf ! que fais-je donc là ! je jure chez le roi ; mais bah ! il paraît que le roi jure bien autrement encore que moi, et jusque dans les églises. Eh, mais ! nous voici donc au Louvre ?…

— Comme vous voyez. M. de Besme vous a introduit ?