Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/49

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toujours, en se tournant le dos, aux deux points opposés du cercle.

D’ailleurs, pas une herbe dans les allées, pas un rejeton parasite dans les plates-bandes ; une petite-maîtresse polit et émonde avec moins de soin les géraniums, les cactus et les rhododendrons de sa jardinière de porcelaine que ne le faisait le maître jusqu’alors invisible du petit enclos.

Monte-Cristo s’arrêta après avoir refermé la porte en agrafant la ficelle à son clou, et embrassa d’un regard toute la propriété.

— Il paraît, dit-il, que l’homme du télégraphe a des jardiniers à l’année, ou se livre passionnément à l’agriculture.

Tout à coup il se heurta à quelque chose, tapi derrière une brouette chargée de feuillage : ce quelque chose se redressa en laissant échapper une exclamation qui peignait son étonnement, et Monte-Cristo se trouva en face d’un bonhomme d’une cinquantaine d’années qui ramassait des fraises qu’il plaçait sur des feuilles de vigne.

Il y avait douze feuilles de vigne et presque autant de fraises.

Le bonhomme, en se relevant, faillit laisser choir fraises, feuilles et assiette.

— Vous faites votre récolte, monsieur ? dit Monte-Cristo en souriant.

— Pardon, monsieur, répondit le bonhomme en portant la main à sa casquette, je ne suis pas là-haut, c’est vrai, mais je viens d’en descendre à l’instant même.

— Que je ne vous gêne en rien, mon ami, dit le comte ; cueillez vos fraises, si toutefois il vous en reste encore.

— J’en ai encore dix, dit l’homme, car en voici onze,