Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 5.djvu/223

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voiture, était déjà descendue, et dont le visage rayonnait de joie en revoyant le comte sain et sauf.

Bertuccio sortit.

Tous les transports d’une fille revoyant un père chéri, tous les délires d’une maîtresse revoyant un amant adoré, Haydée les éprouva pendant les premiers instants de ce retour attendu par elle avec tant d’impatience.

Certes, pour être moins expansive, la joie de Monte-Cristo n’était pas moins grande ; la joie pour les cœurs qui ont longtemps souffert est pareille à la rosée pour les terres desséchées par le soleil : cœur et terre absorbent cette pluie bienfaisante qui tombe sur eux, et rien n’en apparaît au dehors. Depuis quelques jours Monte-Cristo comprenait une chose que depuis longtemps il n’osait plus croire, c’est qu’il y avait deux Mercédès au monde, c’est qu’il pouvait encore être heureux.

Son œil ardent de bonheur se plongeait avidement dans les regards humides d’Haydée, quand tout à coup la porte s’ouvrit. Le comte fronça le sourcil.

M. de Morcerf ! dit Baptistin, comme si ce mot seul renfermait son excuse.

En effet, le visage du comte s’éclaira.

— Lequel, demanda-t-il, le vicomte ou le comte ?

— Le comte.

— Mon Dieu ! s’écria Haydée, n’est-ce donc point fini encore ?

— Je ne sais si c’est fini, mon enfant bien-aimée, dit Monte-Cristo en prenant les mains de la jeune fille, mais ce que je sais, c’est que tu n’as rien à craindre.

— Oh ! c’est cependant le misérable…

— Cet homme ne peut rien sur moi, Haydée, dit Monte-Cristo ; c’est quand j’avais affaire à son fils qu’il fallait craindre.