Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 5.djvu/245

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En entendant annoncer Morrel, qui le quittait il y avait deux heures à peine, le comte releva la tête.

Pour lui, comme pour le comte, il s’était sans doute passé bien des choses pendant ces deux heures, car le jeune homme, qui l’avait quitté le sourire sur les lèvres, revenait le visage bouleversé.

Il se leva et s’élança au-devant de Morrel.

— Qu’y a-t-il donc, Maximilien ? lui demanda-t-il ; vous êtes pâle, et votre front ruisselle de sueur.

Morrel tomba sur un fauteuil plutôt qu’il ne s’assit.

— Oui, dit-il, je suis venu vite, j’avais besoin de vous parler.

— Tout le monde se porte bien dans votre famille ? demanda le comte avec un ton de bienveillance affectueuse à la sincérité de laquelle personne ne se fût trompé.

— Merci, comte, merci, dit le jeune homme visiblement embarrassé pour commencer l’entretien ; oui, dans ma famille tout le monde se porte bien.

— Tant mieux ; cependant vous avez quelque chose à me dire ? reprit le comte, de plus en plus inquiet.

— Oui, dit Morrel, c’est vrai ; je viens de sortir d’une maison où la mort venait d’entrer, pour accourir à vous.

— Sortez-vous donc de chez M. de Morcerf ? demanda Monte-Cristo.

— Non, dit Morrel ; quelqu’un est-il mort chez M. de Morcerf ?

— Le général vient de se brûler la cervelle, répondit Monte-Cristo.

— Oh ! l’affreux malheur ! s’écria Maximilien.

— Pas pour la comtesse, pas pour Albert, dit Monte-Cristo, mieux vaut un père et un époux mort qu’un père et un époux déshonoré ; le sang lavera la honte.