Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/104

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Château-Renaud seul chercha un instant Morrel des yeux ; mais, tandis qu’il avait suivi du regard le comte qui s’éloignait, Morrel avait quitté sa place, et Château-Renaud, après l’avoir cherché vainement, avait suivi Debray et Beauchamp.

Monte-Cristo s’était jeté dans un taillis, et, caché derrière une large tombe, il guettait jusqu’au moindre mouvement de Morrel, qui peu à peu s’était approché du mausolée abandonné des curieux, puis des ouvriers.

Morrel regarda autour de lui lentement et vaguement ; mais au moment où son regard embrassait la portion du cercle opposée à la sienne, Monte-Cristo se rapprocha encore d’une dizaine de pas sans avoir été vu.

Le jeune homme s’agenouilla.

Le comte, le cou tendu, l’œil fixe et dilaté, les jarrets pliés comme pour s’élancer au premier signal, continuait à se rapprocher de Morrel.

Morrel courba son front jusque sur la pierre, embrassa la grille de ses deux mains, et murmura :

— Oh ! Valentine !

Le cœur du comte fut brisé par l’explosion de ces deux mots ; il fit un pas encore, et frappant sur l’épaule de Morrel :

— C’est vous, cher ami ! dit-il, je vous cherchais.

Monte-Cristo s’attendait à un éclat, à des reproches, à des récriminations : il se trompait.

Morrel se tourna de son côté, et avec l’apparence du calme :

— Vous voyez, dit-il, je priais !

Et son regard scrutateur parcourut le jeune homme des pieds à la tête.

Après cet examen, il parut plus tranquille.

— Voulez-vous que je vous ramène à Paris ? dit-il.