Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/117

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de son exaltation dans l’abîme de sa tristesse, ah ! vous vous jouez de moi : vous faites comme ces bonnes mères ou plutôt comme ces mères égoïstes qui calment avec des paroles mielleuses la douleur de l’enfant, parce que ses cris les fatiguent.

Non, mon ami, j’avais tort de vous dire de prendre garde ; non, ne craignez rien, j’enterrerai ma douleur avec tant de soin dans le plus profond de ma poitrine, je la rendrai si obscure, si secrète, que vous n’aurez plus même le souci d’y compatir.

Adieu ! mon ami ; adieu !

— Au contraire, dit le comte ; à partir de cette heure, Maximilien, tu vivras près de moi et avec moi, tu ne me quitteras plus, et dans huit jours nous aurons laissé derrière nous la France.

— Et vous me dites toujours d’espérer ?

— Je te dis d’espérer, parce que je sais un moyen de te guérir.

— Comte, vous m’attristez davantage encore, s’il est possible. Vous ne voyez, comme résultat du coup qui me frappe, qu’une douleur banale, et vous croyez me consoler par un moyen banal, le voyage.

Et Morrel secoua la tête avec une dédaigneuse incrédulité.

— Que veux-tu que je te dise ? reprit Monte-Cristo.

J’ai foi dans mes promesses, laisse-moi faire l’expérience.

— Comte, vous prolongez mon agonie, voilà tout.

— Ainsi, dit le comte, faible cœur que tu es, tu n’as pas la force de donner à ton ami quelques jours pour l’épreuve qu’il tente !

Voyons, sais-tu de quoi le comte de Monte-Cristo est capable ?