Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/181

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Dix personnes s’empressaient auprès de monsieur le procureur du roi, à demi écrasé sur son siège, et lui offraient des consolations, des encouragements, des protestations de zèle et de sympathie.

Le calme s’était rétabli dans la salle, à l’exception cependant d’un point où un groupe assez nombreux s’agitait et chuchotait.

Une femme, disait-on, venait de s’évanouir ; on lui avait fait respirer des sels, elle s’était remise.

Andrea, pendant tout ce tumulte, avait tourné sa figure souriante vers l’assemblée ; puis, s’appuyant enfin d’une main sur la rampe de chêne de son banc, et cela dans l’attitude de la plus gracieuse :

— Messieurs, dit-il, à Dieu ne plaise que je cherche à insulter la cour et à faire, en présence de cette honorable assemblée, un scandale inutile. On me demande quel âge j’ai, je le dis ; on me demande où je suis né, je réponds ; on me demande mon nom. Je ne puis le dire, puisque mes parents m’ont abandonné. Mais je puis bien, sans dire mon nom, puisque je n’en ai pas, dire celui de mon père ; or, je le répète, mon père se nomme monsieur de Villefort, et je suis tout prêt à le prouver.

Il y avait dans l’accent du jeune homme une certitude, une conviction, une énergie qui réduisirent le tumulte au silence. Les regards se portèrent un moment sur le procureur du roi, qui gardait sur son siège l’immobilité d’un homme que la foudre vient de changer en cadavre.

— Messieurs, continua Andrea en commandant le silence du geste et de la voix, je vous dois la preuve et l’explication de mes paroles.

— Mais, s’écria le président irrité, vous avez déclaré dans l’instruction vous nommer Benedetto, vous avez