Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/198

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Monte-Cristo descendit le perron, s’avança vers l’endroit désigné, et vit, au milieu de ses serviteurs faisant cercle autour de lui, Villefort une bêche à la main, et fouillant la terre avec une espèce de rage.

— Ce n’est pas encore ici, disait-il, ce n’est pas encore ici !

Et il fouillait plus loin.

Monte-Cristo s’approcha de lui, et tout bas :

— Monsieur, lui dit-il d’un ton presque humble, vous avez perdu un fils ; mais…

Villefort l’interrompit ; il n’avait ni écouté ni entendu.

— Oh ! je le retrouverai, dit-il ; vous avez beau prétendre qu’il n’y est pas, je le retrouverai, dussé-je le chercher jusqu’au jour du dernier jugement.

Monte-Cristo recula avec terreur.

— Oh ! dit-il, il est fou !

Et, comme s’il eût craint que les murs de la maison maudite ne s’écroulassent sur lui, il s’élança dans la rue, doutant pour la première fois qu’il eût le droit de faire ce qu’il avait fait.

— Oh ! assez, assez comme cela, dit-il, sauvons le dernier.

En rentrant chez lui, Monte-Cristo rencontra Morrel, qui errait dans l’hôtel des Champs-Élysées, silencieux comme une ombre qui attend le moment fixé par Dieu pour rentrer dans son tombeau.

— Apprêtez-vous, Maximilien, lui dit-il avec un sourire, nous quittons Paris demain.

— N’avez-vous plus rien à y faire ? demanda Morrel.

— Non, répondit Monte-Cristo, et Dieu veuille que je n’y aie pas trop fait !