Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/208

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Et ses yeux se reportèrent sur la femme voilée, qui disparut au coin de la rue.

Alors il se retourna.

— Cher ami, dit-il à Maximilien, n’avez-vous point quelque chose à faire dans ce pays ?

— J’ai à pleurer sur la tombe de mon père, répondit sourdement Morrel.

— C’est bien, allez et attendez-moi là-bas ; je vous y rejoindrai.

— Vous me quittez ?

— Oui… moi aussi, j’ai une pieuse visite à faire.

Morrel laissa tomber sa main dans la main que lui tendait le comte ; puis, avec un mouvement de tête dont il serait impossible d’exprimer la mélancolie, il quitta le comte et se dirigea vers l’est de la ville.

Monte-Cristo laissa s’éloigner Maximilien, demeurant au même endroit jusqu’à ce qu’il eût disparu, puis alors il s’achemina vers les Allées de Meilhan, afin de retrouver la petite maison que les commencements de cette histoire ont dû rendre familière à nos lecteurs.

Cette maison s’élevait encore à l’ombre de la grande allée de tilleuls qui sert de promenade aux Marseillais oisifs, tapissée de vastes rideaux de vigne qui croisaient, sur la pierre jaunie par l’ardent soleil du Midi, leurs bras noircis et déchiquetés par l’âge. Deux marches de pierre, usées par le frottement des pieds, conduisaient à la porte d’entrée, porte faite de trois planches qui jamais, malgré leurs réparations annuelles, n’avaient connu le mastic et la peinture, attendant patiemment que l’humidité revînt pour les approcher.

Cette maison, toute charmante malgré sa vétusté, toute joyeuse malgré son apparente misère, était bien la même qu’habitait autrefois le père Dantès. Seulement le vieil-