Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/248

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— Très bien ; montrez-le-moi.

Sur cet ordre assez impertinent, Peppino approcha si brusquement sa torche du visage de Danglars, que celui-ci se recula vivement pour ne point avoir les sourcils brûlés.

Ce visage bouleversé offrait tous les symptômes d’une pâle et hideuse terreur.

— Cet homme est fatigué, dit le capitaine, qu’on le conduise à son lit.

— Oh ! murmura Danglars, ce lit, c’est probablement un des cercueils qui creusent la muraille ; ce sommeil, c’est la mort qu’un des poignards que je vois étinceler dans l’ombre va me procurer.

En effet, dans les profondeurs sombres de l’immense salle, on voyait se soulever, sur leurs couches d’herbes sèches ou de peaux de loup, les compagnons de cet homme qu’Albert de Morcerf avait trouvé lisant les Commentaires de César, et que Danglars retrouvait lisant la Vie d’Alexandre.

Le banquier poussa un sourd gémissement et suivit son guide : il n’essaya ni de prier ni de crier. Il n’avait plus ni force, ni volonté, ni puissance, ni sentiment ; il allait parce qu’on l’entraînait.

Il heurta une marche, et, comprenant qu’il avait un escalier devant lui, il se baissa instinctivement pour ne pas se briser le front, et se trouva dans une cellule taillée en plein roc.

Cette cellule était propre, bien que nue, sèche, quoique située sous la terre à une profondeur incommensurable.

Un lit fait d’herbes sèches, recouvert de peaux de chèvre, était, non pas dressé, mais étendu dans un coin de cette cellule.

Danglars, en l’apercevant, crut voir le symbole radieux de son salut.