Page:Dupuis - Abrégé de l’origine de tous les cultes, 1847.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pouvoir traiter comme l’on traitait avec les ministres et les agents des administrations humaines.

C’est ici que commence le culte ; car nous n’adressons des vœux et des prières qu’à des êtres capables de nous entendre et de nous exaucer. Ainsi Agamemnon dans Homère, apostrophant le Soleil, lui dît : « Soleil, qui vois tout et entends tout. » Ce n’est point ici une figure poétique ; c’est un dogme constamment reçu, et l’on regarda comme impie le premier philosophe qui osa avancer que le Soleil n’était qu’une masse de feu. On sent combien de telles opinions nuisaient aux progrès de la physique, lorsqu’on pouvait expliquer tous les phénomènes de la Nature par la volonté de causes intelligentes qui avaient leur siège dans le lieu où se manifestait l’action de la cause. Mais si par là l’étude de la physique éprouva de grands obstacles, la poésie y trouva de grandes ressources pour la fiction. Tout fut animé chez elle, comme tout paraissait l’être dans la Nature.


Ce n'est plus la vapeur qui produit le tonnerre,
C’est Jupiter armé pour effrayer la Terre ;
Un orage terrible aux yeux des matelots,
C’est Neptune en courroux qui gourmande les ilôts,
Écho n’est plus un son qui dans l’air retentisse,
C’est une Nymphe en pleurs qui se plaint de Narcisse.

Boileau, Art poétique, 1. III.

Tel fut le langage de la poésie dès la plus haute antiquité ; et c’est d’après ces données que nous procéderons à l’explication de la mythologie et des