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Quand le jour de la cérémonie est venu, les hommes s’assemblent et se rendent à l’endroit où se trouve le Minkani. Là, ils creusent jusqu’à ce qu’ils atteignent une couche de terre humide et ce qu’ils appellent « les excréments du Minkani ». À partir de ce moment, on continue à fouiller le sol avec de grandes précautions jusqu’à ce qu’on mette à découvert « le coude du Minkani ». Alors, deux hommes s’ouvrent les veines et laissent leur sang couler sur la pierre sacrée. On chante le chant du Minkani tandis que les assistants, emportés par une véritable frénésie, se frappent les uns les autres avec leurs armes. La bataille dure jusqu’à ce qu’ils soient rentrés au camp, qui est situé à une distance d’un mille environ. Là, les femmes interviennent et mettent fin au combat. On recueille le sang qui coule des blessures, on le mêle aux « excréments du Minkani » et on sème les produits du mélange sur la dune. Le rite accompli, on est convaincu que les serpents tapis naîtront en abondance[1].

Dans quelques cas, on emploie, comme principe vivifiant, la substance même que l’on cherche à produire. Ainsi chez les Kaitish, au cours d’une cérémonie qui a pour but de faire de la pluie, on arrose d’eau une pierre sacrée, qui représente des héros mythiques du clan de l’Eau. Il est évident que, par ce moyen, on croit augmenter les vertus productrices de la pierre tout aussi bien qu’avec du sang, et pour les mêmes raisons[2]. Chez les Mara, l’opérateur va puiser de l’eau dans un trou sacré, il en boit et en crache dans toutes les directions[3]. Chez les Worgaia, quand les ignames commencent à pousser, le chef du

  1. Howitt, Nat. Tr., p. 798. Cf. Howitt, Legends of the Dieri and Kindred Tribes of Central Australia, in J.A.I., XXIV, p. 124 et suiv. Howitt croit que la cérémonie est célébrée par les gens du totem, mais n’est pas en mesure de certifier le fait.
  2. North. Tr., p. 295.
  3. Ibid., p. 314.