Page:Edgar Poe Arthur Gordon Pym.djvu/134

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combait maintenant le devoir d’employer mes forces au salut de la communauté.

Peters avait laissé un des porte-haubans dans le passage, et je vis, sitôt que j’eus plongé, que je n’avais pas un poids suffisant pour me tenir solidement sous l’eau. Je résolus donc, pour ma première tentative, de retrouver d’abord et simplement l’autre poids. Dans ce but, je tâtais le plancher du couloir, quand je sentis quelque chose de dur, que j’empoignai immédiatement, n’ayant pas le temps de vérifier ce que c’était ; puis je m’en revins et je remontai directement à la surface. Ma trouvaille était une bouteille, et on concevra quelle fut notre joie quand nous vîmes qu’elle était pleine de vin de Porto. Nous rendîmes grâces à Dieu pour cette consolation et ce secours si opportun, puis avec mon canif nous tirâmes le bouchon, et, pour une gorgée très-modérée qu’avala chacun de nous, nous nous en sentîmes singulièrement réconfortés, et comme inondés de chaleur, de forces et d’esprits vitaux. Nous rebouchâmes alors la bouteille soigneusement, et au moyen d’un mouchoir nous l’amarrâmes de façon qu’il lui fût impossible de se briser.

Je me reposai un peu après cette heureuse découverte, puis je descendis, et enfin je retrouvai le porte-haubans avec lequel je montai immédiatement. Après l’avoir attaché à mon pied, je me laissai couler pour la troisième fois, et il me fut démontré que je ne pourrais jamais réussir à forcer la porte de la cambuse. Je revins désolé.

Bien décidément, il fallait donc renoncer à toute espé-