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séparées par des listeaux, comme il s’en remarque à la base attique de la Planche VI. Cette moulure se trace de deux manieres; on appelle celle I, moderne, & celle de la Planche quatrieme, marquée K, antique. Pour tracer la moderne, il faut diviser sa hauteur & sa saillie en trois également; & du point 8, comme centre, décrire la premiere portion de cercle 1, 10; ensuite du point 9, sommet d’un triangle équilatéral, décrire la portion de cercle 10, 11; puis du point 11 au point 9, prolonger une oblique au point 12 qui, comme centre, servira à décrire la troisieme portion de cercle 11, 15; le reste de cette courbe se tracera à la main depuis 15 jusqu’à 2.

PLANCHE IV.
Suite des différentes especes de moulures.

La moulure K est la scotie appellée antique, qui se décrit par les deux centres 1, 7; elle est moins estimée que la moderne, à cause de sa cavité inférieure, & de la vive arrête qu’elle forme vers 4; défaut qui ne la fait guere mettre en œuvre que dans l’intérieur des appartemens, ou dans les dehors seulement, lorsqu’on préfere le marbre à la pierre, comme en usoient les Grecs & les Romains. Les lignes ponctuées, qui indiquent la construction de cette moulure, nous dispensent d’une plus grande explication.

Les moulures L, M, sont des quarts de rond, appellés ainsi, parce qu’assez communément elles se tracent par un quart de cercle; mais comme toutes les especes de moulures dont nous parlons, doivent appartenir à des ordres qui ont chacun une différente expression; que par conséquent ces moulures sont obligées d’avoir plus ou moins de concavité ou de convexité, on les trace par diverses portions de cercle que démontre la théorie, mais que le plus souvent la pratique néglige; par exemple, le quart de rond convexe 3, 4, & le quart de rond concave 7, 8 de la figure M, sont tous deux tracés par les deux angles 5, 6 d’un quadrilatere qui leur sert de foyer. Ces deux quarts de rond sont destinés aux décorations viriles; au contraire les deux courbes de la figure L, décrites, sçavoir, celle 5, 5, par le sommet 3 d’un triangle équilatéral; celles 6, 6, par le sommet 4 d’un triangle isocele, présentant moins de solidité, rendent ces moulures plus propres au caractere moyen & délicat des ordres ïonique, corinthien & composite.

Les moulures de la figure N sont destinées aux architraves, aux chambranles des croisées, aux archivoltes, aux impostes, & ne sont autre chose que plusieurs plates-bandes séparées les unes des autres par de petites moulures, telles qu’il s’en remarque dans l’architrave de l’ordre corinthien; quelquefois même, pour donner encore moins de saillie aux membres qui contiennent ces plates-bandes, on incline en-dehors la surface de ces dernieres, comme l’expriment les lignes ponctuées 1, 2, 3, & comme on le remarque à l’architrave du petit ordre intérieur de l’église de l’Oratoire à Paris.

Les moulures O, P, sont appellés congés; ce sont des especes de cavets qui servent aux fûts des colonnes ou pilastres, pour réunir les moulures horisontales de l’astragal & du listeau de la base, avec la partie verticale de ce même fût: celle O se trace par le sommet d’un triangle équilatéral; celle P, par l’angle d’un quadrilatere.

La moulure Q est composée d’une baguette, d’un filet & d’un congé. La baguette se trace par un demi-cercle, & le congé par un quart de cercle. Ce membre est destiné principalement à couronner la partie supérieure du fût des colonnes & des pilastres: il sert aussi dans les corniches des entablemens & des bases des colonnes, ainsi qu’on en remarque plusieurs dans les Planches VI. & VII.

La moulure R est une doucine comme celles E, F, de la planche précédente, mais à laquelle on a ajoûté un cavet 8, pour procurer un canal renfoncé au sophite d’un larmier, & former un listeau 7 sur le devant, ainsi que nous l’avons expliqué en parlant du membre B, Planche III.

Enfin la moulure S est une moulure composée appellée bec de corbin; elle est tracée par deux courbures: la

premiere tracée par le sommet du triangle équilatéral 8; la deuxieme, par le foyer 5. Dans la partie inférieure de cette moulure, on a observé un grain d’orge 7, espece de petite moulure quarrée & ravalée, qui sert à détacher les grandes moulures circulaires d’avec celles qui sont quarrées, dans le dessein de donner plus de jeu, plus d’effet, & une certaine articulation à toutes les moulures d’une corniche.

Tous ces membres sont susceptibles d’enrichissemens; on y applique des ornemens selon qu’ils font partie des ordres ïonique, corinthien, ou composite; quelquefois même les moulures de l’ordre dorique peuvent en recevoir: mais il n’en faut jamais revêtir celles de l’ordre toscan, quoiqu’il s’en remarque à la colonne trajane & dans quelques-uns de nos édifices françois. Il seroit même bon d’user avec discrétion des ornemens sur les moulures en général; du-moins devroit-on les reserver pour les dedans des bâtimens. Dans les dehors ces ornemens sont sujets à ne présenter que de petites parties; ils corrompent la forme des moulures; d’ailleurs ils se dégradent par l’impression de l’air, se noircissent en peu de tems, & ne présentent plus à l’œil, & vûs de quelque distance, qu’une confusion mal entendue.

PLANCHE V.
Des piédestaux.

Cette Planche offre les piédestaux que les anciens ont ajoûté aux ordres d’Architecture: presque tous ont varié sur leur hauteur. Ici nous donnons ceux de Vignole, qui, comme nous l’avons remarqué, leur a établi le tiers de la colonne, y compris base & chapiteau. Chaque piédestal est composé d’une base A, d’un dez B, & d’une corniche C Les deux membres A & C sont ornés de plusieurs moulures assorties à l’expression de chaque ordre. Quelquefois l’on enrichit le dez B d’une table. Il faut avoir attention, dans l’ordre toscan, de faire cette table saillante, d’araser la dorique, de faire l’ïonique rentrante, ainsi que celles des piédestaux corinthiens & composites; mais d’orner ces dernieres de quelques moulures.

Nous remarquerons que non-seulement les piédestaux de Vignole sont trop élevés, mais qu’en général cette innovation des modernes se contredit avec la pratique d’élever plusieurs ordres les uns sur les autres, parce que les piédestaux des ordres supérieurs produisent des porte-a-faux considérables sur ceux de dessous; ce qui nous incline à croire qu’à l’exception des édifices publics, qui n auroient qu’un seul ordre, & où on les pourroit employer par tolérance, il n’en faudroit jamais faire usage dans les bâtimens d’habitation, mais seulement d’un socle, tel que le représente la fig. D; socle qui pouvant être réduit au quart de l’ordre au plus ou au diametre au-moins, procure plus d’élévation à l’ordre, & évite la plus grande partie des porte-à-faux dont nous voulons parler. Il faut remarquer que ce socle doit avoir un peu plus de longueur que le dez du piédestal: celui-ci est réduit à la saillie de la base de l’ordre; au lieu que le socle doit l’excéder de chaque côté d’une minute ou d’une minute & demie.

On trouvera dans cette Planche toutes les mesures des moulures des piédestaux selon Vignole: néanmoins on peut les varier à l’infini, selon la richesse ou la simplicité de chaque ordre, & selon leurs diverses applications à l’Architecture. Par exemple, nous ne pouvons le dissimuler, la corniche C du piédestal toscan n’est guere supportable; elle est trop pauvre & trop matérielle, comparaison faite avec celle des autres piédestaux du même auteur. D ailleurs une corniche, pour être appellée telle, doit être composée de trois membres, & celle dont nous parlons n’en a que deux; ce qui la doit faire rejetter absolument. A l’égard des moulures des autres corniches, elles peuvent recevoir quelques changemens, à la vérité, mais du moins elles ont un caractere convenable & une dimension générale assez analogue à l’expression de chaque ordre que leur piédestal soutient.