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garde contre les reins, & lui présenter la pointe au ventre.

On doit observer, en allant au désarmement, de ne saisir jamais le bras de son adversaire ni sa lame avec la main gauche; car en saisissant son bras, il peut se rendre maître de son épée & la reprendre de sa main gauche par la garde ou par le fort de la lame; conséquemment il pourroit fournir un coup de pointe à bras raccourci. Si on saisissoit sa lame, il pourroit aussi raccourcir le bras, retirer son épée avec force & couper la main qui l'empoigneroit. A dire vrai, tous ces désarmemens, dont on a donné l'explication, sont plus brillans dans une salle d'armes le fleuret à la main, lorsqu'ils sont exécutés avec jugement & précision, qu'utiles l'épée à la main. Cependant dans une affaire particuliere on peut s'en servir vis-à-vis de ceux qui s'abandonnent sur les coups qu'ils tirent, & qui ne se remettent pas en garde avec toute la vivacité necessaire. L'épée à la main, il faut préférer le croisé d'épée ou le coup de fouet; on ne risque rien; & si on ne fait pas sauter l'épée de la main de son adversaire, on a assez de jour pour le toucher au corps si on en a l'intention.

Observations sur les gauchers.

Il peut arriver à un droitier d'être fort embarrassé de se défendre contre un gaucher, parce que la fréquente habitude où on est de faire des armes entre droitiers donne au gaucher un avantage considérable. Il est rare d'avoir occasion de se mesurer avec un gaucher, car l'espece de ce dernier n'est pas nombreuse. Par la même raison deux gauchers qui se mesureroient ensemble seroient embarrassés l'un & l'autre.

Pour obvier à cet inconvenient, il seroit bon qu'un maître d'armes accoûtumât ses écoliers à tirer des deux mains; c'est-à-dire que, lorsqu'un écolier manieroit bien son fleuret avec la main droite, il faudroit l'éxercer avec la main gauche. Cet exercice seroit difficile pour tout le monde, mais avec de la bonne volonté & en prenant quelque peine on parvient à un degré d'habileté, qui est avantageux pour soi & fait honneur à celui qui enseigne.

Le maître d'armes devroit non-seulement donner leçon des deux mains à ses écoliers, mais encore les instruire de cette sorte par des mouvemens d'assaut. Cette méthode les mettroit en état de se défendre des deux mains, & ils ne seroient jamais embarrassés vis à vis d'un adversaire, qui se présenteroit dans une position différente de la leur.

Lorsqu'un droitier & un gaucher font des armes ensemble, ils doivent avoir attention de défendre le dehors des armes: ce côté étant plus foible que celui du dedans. Ils ont tous deux la facilité de donner le coup de fouet ou de faire le glissement de lame au-dehors des armes.

Si on donne le coup de fouet à propos, il est presqu'impossible que l'épée ne saute de la main, à moins que l'adversaire ne saisisse le tems qu'on donne ledit coup de fouet, soit pour dégager, soit pour tourner la main en tierce.

Il faut observer que le droitier doit tirer au gaucher quarte au lieu de tierce & tierce au lieu de quarte, c'est à-dire, qu'il doit tirer tous les coups du dedans au-dehors des armes, & ceux du-dehors au-dedans. Les mêmes regles sont pour le gaucher lorsqu'il tire ses coups au droitier. Par ce moyen la main sera toujours opposée à l'épée, & le corps & le visage seront à couvert.

De la garde allemande.

Dans la position de la garde allemande on a ordinairement la main tournée en tierce, le bras & le poignet sur la ligne de l'épaule, la pointe de l'épée à la ceinture de son adversaire, la hanche droite extrêmement cavée, le corps en avant, le genou droit plié & le jarret gauche tendu. Les allemands cherchent toujours l'épée loit de prime, soit de seconde, tirent dans cette position souvent à bras raccourci, tiennent la main gauche devant l'estomac & s'en servent pour parer au besoin, & aussi-tôt qu'il tirent l'épée, ils donnent un grand coup du tranchant sur la lame de leur adversaire afin de le désarmer, s'ils le peuvent.

Defense contre la garde allemande.

Pour combattre cette garde, il faut se présenter hors de mesure, attaquer brusquement du pié & au-dedans des armes, tirer des demi-bottes au visage de son adversaire afin de l'obliger de hausser davantage son poignet & profiter de ce tems pour dégager par-dessus le fort de son épée & lui tirer à fond un coup de seconde On peut aussi se mettre en garde en seconde, en tenant la pointe de l'épée droite à son aisselle, faire feinte du dehors au-dedans des armes par-dessus sa lame, & faire une attaque du pié dans le tems de la feinte pour le faire aller plus promptement à l'épée: alors saisir ce tems pour faire un second dégagement par-dessus sa lame, & lui tirer un coup de seconde ou de quinte. S'il pare ce coup, on doit tripler le dégagement & lui tirer un coup de prime ou de quarte au-dedans des armes.

Si on veut attendre l'attaque, il faut se mettre en garde en tierce haute & la pointe dirigée à l'épaule droite de l'adversaire, ne pas s'ébranler des mouvemens qu'il pourroit faire, à moins qu'ils fussent assez écartés pour lui tirer sur le tems un coup droit. S'il se tenoit ferme dans sa garde, il faudroit lui donner assez de jour an dedans des armes pour l'engager d'y tirer: pour lors parer de prime ou de demi-cercle en traversant la ligne sur la droite & lui riposter vivement en tenant le poignet dans la même position du coup qu'on aura paré.

S'il n'attaque pas, ou n'est pas ébranlé des attaques qu'on lui a fait, il faut se placer en tierce haute, comme on l'a expliqué ci-devant, tourner subtilement la main de tierce en quarte en passant la pointe de l'épée par-dessus le fort de sa lame (ce qui forme un demi-cercle), frapper ferme du fort du dedans de l'épée sur sa lame & aussi-tôt lui tirer à fond un coup de quarte. De cette maniere il ne seroit pas difficile de lui faire sauter l'épée de la main.

S'il pare avec sa main gauche, on observera de ne point lui tirer au-dedans des armes, qu'on ne lui ait tiré auparavant une demi-botte soutenue, pour tromper la parade de sa main gauche.

De la garde italienne.

La garde ordinaire des italiens est fort basse, ils plient également les deux genoux, portent le corps au milieu des deux jambes, tiennent le poignet & la pointe de l'épée basse, raccourcissent assez le bras, mettent la main gauche devant la poitrine, s'en servent pour parer, & aussi-tôt ripostent.

Quoique cette garde leur soit ordinaire, ils la varient à tout moment pour embarrasser leur adversaire, en haussant le poignet à la hauteur de la ligne de l'épaule & de la pointe de l'épée, en tenant le poignet haut & la pointe fort basse, en faisant de grands mouvemens du corps & de la pointe, en tournant autour de celui avec qui il font des armes, tantôt par sa droite, tantôt par sa gauche, ou en avançant imperceptiblement le pié gauche près du pié droit, & tirent des coups droits de volée ou font des passes ou des voltes. Ils se fient beau-coup sur leur agilité & leur parade de la main gauche. C'est pour cela que deux italiens, qui se battent ensemble, se donnent très-souvent coup pour coup (ce qu'on appelle coups fourrés), ce qui arrive rarement entre bons tireurs, parce qu'ils savent chercher l'épée soit avec le contre-dégagement, soit avec le cercle, & qu'ils ont une prompte riposte.

Malgré cela, il n'est pas douteux que leur jeu embarrasseroit même un habile homme, s'il ne prenoit pas les précautions qu'on expliquera ci-après.

Défense contre la garde italienne.

Pour se défendre contre le jeu d'un italien, il faut avoir beaucoup de sens froid & se mettre dans une po-