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RESPECTE TA MAIN[1]
Au sculpteur Jean Baffier.

Mesdames. Messieurs,


S je débutais par vous dire : Je vous apporte la vérité, vous devriez au moins sourire devant une présomption aussi étrange. Et pourtant vous venez ici, vous venez à toute conférence, décidés à ouïr des affirmations que nul ne viendra là réfuter, sermons que vous laisserez poliment s’implanter en vous, où ils vous deviendront vérités pures. Aussi bien que tout conférencier j’aborde donc l’auditoire avec cette prétention inouïe et d’avance admise : dire la vérité.

Quelle donc responsabilité ! et la redoutable entreprise qu’apostropher d’autres humains réunis ! Eh bien, non. Chez soi, l’écrivain se voit pour interlocuteur le plus complaisant des miroirs, une feuille blanche, et s’y reflète devant soi-même et pour soi-même,

Tel qu’en un autre enfin la vanité nous change.

Mais ici l’horizon se déplace. Cet exercice que la religion pratique, exercice comme toute entreprise humaine si aisément dénaturé, mais sublime en soi : la confession, cet exercice si ardu de nous-mêmes à nous-mêmes, devant notre pauvre papier, devant notre misérable cœur, l’appareil d’un homme

  1. Conférence faite à l’exposition Gaston Prunier, le 23 janvier 1905.