Page:Ferdinand Buisson - Sébastien Castellion - Tome 1.djvu/63

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1>REMiERES ANNÉES DE JEUNESSE. L¥0N. 45 ront à croire qu’il a été brûlé connue blasphémateur et comme athée ‘. Ils iguoreront les derniers écrits de Dolet dont la virile sincérité les eût sans doute désabusés ’; ils ignoreront surtout, et l`on ignorera presque jusqu’a nos jours cet admi- , rable Cantique cL’Etie¢me Dolet prisonnier en la conciergerie, .vraie confession de foi d’un stoïcien qui croit en Dieu plus que n’y croient ses juges. Théodore de Béze seul avait cédé a un premier mouvement dont la justesse égale la générosité : il insérait dans ses Poemata de *1548 une ode courageuse encore qu’étrangement mythologique ou il montre le philo- sophe TH3.l`l·yI`, Ardentem medio rogo Doletum, appelé au ciel par Dieu lui—meme (Dicoram pater). Quelques années apres, Théodore de Beze fera amende honorable et sapprimera cette piece de toutes les nouvelles éditions de ses Jtwenilia. _ Et notre Castellion lui-même — tant il est impossible de réagir contre la calomnie, quand elle se fait légende — écrira un jour cette phrase pour défendre Michel Servet : « Ils ont . fini par faire croire au vulgaire que Servet était quelqu’un de semblable a Rabelais, a Dolet ou ai Villanocanas, quel- qu`un pour qui il n’y avait ni Dieu ni Christ ° >>. Ce passage présente un intéret particulier. On pourrait ètre tenté d’abord de n’y voir qu’un moyen de défense, un artifice 1. M. Douen a sputena, dans une brochure pleine d`intérèt et où se retrouve son érudi- tion ordinaire, qu'Etienne Dolet dans ses dernières années avait renoncé ii son attitude dc païen également hostile aux deux religions et s‘étaiL consacré ii la cause de l'Evangile.(Étienue Dolet, ses opinions religieuses, ezlr. du Bull. de la Soc. d`hist. du protest , Paris, 1SSI, in·S.) M. Christie combat cette opinion, qn`il juge purement conjecturnle. La question ne nous semble pas completement élucidée; mais ce qui est hors de toute contestation, d'après les termes memes de l'arret, c’est que le grief le plus sérieux, le seul même serieux contre lui. est la vente de livres prohibés et damnés, c'est-ii-dire de la Bible et des écrits luthèriens. 9. Notamment son Second Enfer, ou il explique si bien la vraie raison des poursuites : C'est que je vends et imprime sans craincte ' · Livres plusieurs de l'Escripture saincte .... _ Voila peurquay je leur says odieux, Voilà pourquoi ont juré leurs grands dieux QUE ICD l`|\O\.\\`l‘|ll..., _ l 3. « llane interpretationem in vulgus ita invidiose exngitnrunt ut patent homines Servetum aliqucm fuisse Rabelasii, aut Doleti, aut Villanovani similem, qui nullum Deum aut Chris- tam huberct. » Ce passage, cité dans le Bull. de la Soc. d’liisl. du p1·otest.(2° série, II, p. 335) comme emprunté à un manuscrit de Castellion a Bale, se trouve en effet dans le fragment manuscrit du Contra libellum Culvini que possède la bibliothèque dc Bale; il est d`nillcurs imprimé dans le Contra libellum Caluini, art. 147, in nue. —