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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Du Camp n’a pas signé le numéro. Est-ce parce qu’on y faisait ton éloge ? Dans la Chronique, du ton le plus bas, le Philosophe est injurié, sans raison, à propos de rien. La suite du roman de Gozlan[1] est ignoble. Quel triste recueil ! Quant à cette Chronique, que ces messieurs signent maintenant du nom anonyme de Cyrano (rien que cela de prétention !), c’est une infamie. Lorsqu’on parle aux gens d’une telle manière, il faut au moins porter sa carte de visite à son chapeau.

J’ai écrit deux fois en Angleterre pour ton album et n’ai pas eu de réponse, ce qui m’étonne excessivement. Je connais en ce moment un jeune homme à Londres qui doit, je crois, bientôt revenir. Veux-tu que je lui fasse écrire d’aller le prendre ?

Depuis que nous nous sommes quittés, j’ai fait huit pages de ma deuxième partie[2] : la description topographique d’un village. Je vais maintenant entrer dans une longue scène d’auberge qui m’inquiète fort. Que je voudrais être dans cinq ou six mois d’ici ! Je serais quitte du pire, c’est-à-dire du plus vide, des places où il faut le plus frapper sur la pensée pour la faire rendre.

Ta lettre de ce matin aussi m’attriste. Pauvre chère femme, comme je t’aime ! Pourquoi t’es-tu blessée d’une phrase qui était au contraire l’expression du plus solide amour qu’un être humain puisse porter à un autre ? Ô femme ! femme, sois-le donc moins ! Ne le sois qu’au lit ! Est-ce que ton corps ne m’enflamme pas, quand j’y suis ? Ne

  1. Le Lilas de Perse.
  2. De Madame Bovary.