Page:Flaubert - Bouvard et Pécuchet, éd. Conard, 1910.djvu/319

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d’innocence. Pécuchet regretta la sienne. Mais on remuait des chaises, les mères avaient hâte d’embrasser leurs enfants.

Les paroissiens, à la sortie, échangèrent des félicitations. Quelques-uns pleuraient. Mme de Faverges, en attendant sa voiture, se tourna vers Bouvard et Pécuchet et présenta son futur gendre :

M. le baron de Mahurot, ingénieur !

Le comte se plaignait de ne pas les voir. Il serait revenu la semaine prochaine.

— Notez-le ! je vous prie.

La calèche étant arrivée, les dames du château partirent, et la foule se dispersa.

Ils trouvèrent dans leur cour un paquet au milieu de l’herbe. Le facteur, comme la maison était close, l’avait jeté par-dessus le mur. C’était l’ouvrage que Barberou avait promis : Examen du Christianisme, par Louis Hervieu, ancien élève de l’École normale. Pécuchet le repoussa. Bouvard ne désirait pas le connaître.

On lui avait répété que le sacrement le transformerait : durant plusieurs jours, il guetta des floraisons dans sa conscience. Il était toujours le même, et un étonnement douloureux le saisit.

Comment ! la chair de Dieu se mêle à notre chair et elle n’y cause rien ! La pensée qui gouverne les mondes n’éclaire pas notre esprit ! Le suprême pouvoir nous abandonne à l’impuissance !

M. Jeufroy, en le rassurant, lui ordonna le Catéchisme de l’abbé Gaume.

Au contraire, la dévotion de Pécuchet s’était développée. Il aurait voulu communier sous les deux espèces, chantait des psaumes en se promenant dans le corridor, arrêtait les Chavignollais