Page:Flaubert - Bouvard et Pécuchet, éd. Conard, 1910.djvu/338

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

taient les criminels. Je me résume : Point d’État sans Dieu ! la loi ne pouvant être respectée que si elle vient d’en haut, et, actuellement, il ne s’agit pas des Italiens, mais de savoir qui l’emportera de la révolution ou du pape, de Satan ou de Jésus-Christ.

M. Jeufroy approuvait par des monosyllabes, Hurel avec un sourire, le juge de paix en dodelinant la tête. Bouvard et Pécuchet regardaient le plafond ; Mme de Noares, la comtesse et Yolande travaillaient pour les pauvres, et M. de Mahurot, près de sa fiancée, parcourait les feuilles.

Puis il y avait des silences, où chacun semblait plongé dans la recherche d’un problème. Napoléon III n’était plus un sauveur, et même il donnait un exemple déplorable en laissant aux Tuileries les maçons travailler le dimanche.

« On ne devrait pas permettre », était la phrase ordinaire de M. le comte.

Économie sociale, beaux-arts, littérature, histoire, doctrines scientifiques, il décidait de tout, en sa qualité de chrétien et de père de famille ; et plût à Dieu que le gouvernement, à cet égard, eût la même rigueur qu’il déployait dans sa maison ! Le pouvoir seul est juge des dangers de la science ; répandue trop largement elle inspire au peuple des ambitions funestes. Il était plus heureux, ce pauvre peuple, quand les seigneurs et les évêques tempéraient l’absolutisme du roi. Les industriels maintenant l’exploitent. Il va tomber en esclavage.

Et tous regrettaient l’ancien régime : Hurel par bassesse, Coulon par ignorance, Marescot comme artiste.