Page:Flaubert - Madame Bovary, Conard, 1910.djvu/193

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Puis, se tournant sur sa chaise :

— Et quoi de neuf chez vous ?

— Pas grand-chose. Ma femme, seulement, a été cette après-midi, un peu émue. Vous savez, les femmes, un rien les trouble ! la mienne surtout ! Et l’on aurait tort de se révolter là contre, puisque leur organisation nerveuse est beaucoup plus malléable que la nôtre.

— Ce pauvre Léon ! disait Charles, comment va-t-il vivre à Paris ?… S’y accoutumera-t-il ?

Mme Bovary soupira.

— Allons donc ! dit le pharmacien en claquant de la langue, les parties fines chez le traiteur ! les bals masqués ! le champagne ! tout cela va rouler, je vous assure.

— Je ne crois pas qu’il se dérange, objecta Bovary.

— Ni moi ! reprit vivement M. Homais, quoiqu’il lui faudra pourtant suivre les autres, au risque de passer pour un jésuite. Et vous ne savez pas la vie que mènent ces farceurs-là, dans le quartier Latin, avec les actrices ! Du reste, les étudiants sont fort bien vus à Paris. Pour peu qu’ils aient quelque talent d’agrément, on les reçoit dans les meilleures sociétés, et il y a même des dames du faubourg Saint-Germain qui en deviennent amoureuses, ce qui leur fournit, par la suite, les occasions de faire de très beaux mariages.

— Mais, dit le médecin, j’ai peur pour lui que… là-bas…

— Vous avez raison, interrompit l’apothicaire, c’est le revers de la médaille ! et l’on y est obligé continuellement d’avoir la main posée sur son gousset. Ainsi, vous êtes dans un jardin public, je