Page:Flaubert - Notes de voyages, I.djvu/403

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terre s’étend en langue du côté gauche, la végétation cesse brusquement, puis on tourne à droite, marchant parallèlement au sens du rivage. — Montagnes de rochers nus, en marbre bleu turquin très foncé. — On monte aussi et l’on descend successivement deux collines. Le soleil est très chaud, je marche avec furie, seul moyen que je sente d’aller, tant je suis brisé par toutes mes nuits d’insomnie précédentes et par mon mulet que je maudis du fond du cœur.

Lindo. — On aperçoit Lindo à gauche, en bas, au bord d’un petit golfe. La ville s’étend en demi-cercle, entourée de jardins pleins de figuiers, de vignes, de mûriers ; la route est au bord de l’espèce de falaise qui contourne le vallon au fond duquel est Lindo. Maisons blanches, beau village éclairé et propre, mer bleue, silence. — À l’entrée du golfe, deux rochers ; à l’entrée de la ville, une fontaine turque en marbre blanc, avec quatre robinets, ornée d’une inscription turque ombragée d’un grand platane.

Nous descendons chez une veuve à réputation suspecte et honnie dans le pays pour avoir été de connivence avec un pirate, femme d’environ 40 ans, jadis belle. — Mosaïque en cailloux noirs et blancs, intérieur propre, un violon au-dessus du divan.

La forteresse domine le pays et est à pic sur la mer, des escaliers larges y mènent. Sur le plateau de la forteresse, des arbres sont venus au hasard : un figuier sauvage, un arbousier ; il y a un palmier qui, d’en bas, couronne le tout et passe sa tête par-dessus les murs. — Restes de murs antiques, grecs, admirablement construits, à pic du